Loi immigration : le PS ne votera pas une motion de censure des Républicains

Olivier Faure, député de Seine-et-Marne et secrétaire national du Parti socialiste, à l’Assemblée nationale, le 31 octobre 2023. ©Purepolitique

Depuis plusieurs mois, les Républicains menacent le gouvernement d’une motion de censure s’il persiste à vouloir régulariser les travailleurs sans-papiers dans les filières en tension. C’est le fameux article 3 du projet de loi sur l’immigration qui sera examiné à partir du 27 novembre à l’Assemblée. Il y a du nouveau.

Jusqu’à présent, les Républicains ont refusé de s’associer aux motions de censure déposées par la gauche ou le Rassemblement national. Même si, au moment de la réforme des retraites, un certain nombre de dissidents LR, emmenés par Aurélien Pradié, le député du Lot, ont voté la motion déposée par le groupe Liot.

L’annonce d’une probable motion de censure LR sur l’immigration laissait donc entrevoir la chute du gouvernement. En additionnant les voix des députés de l’ex-Nupes, celles du RN et celles des LR, on dépasse la majorité requise pour renverser le gouvernement. Mais ça, ça n’arrivera pas.

Vote conjoint enterré

Mardi 31 octobre, sur France 2, Olivier Faure a définitivement enterré l’hypothèse d’un vote conjoint des oppositions.

Vous pourriez voter une motion de censure déposée par la droite et donc probablement faire tomber le gouvernement ?

Non, moi je ne voterai pas une motion qui serait une motion pour aller plus loin encore que ce que veut le gouvernement. Il ne faut pas exagérer.

Olivier Faure, député de Seine-et-Marne et secrétaire national du Parti socialiste, France 2, 31 octobre 2023

Cet accès de vertu n’est pas dépourvu d’arrière-pensées électorales. Emmanuel Macron a souvent brandi la menace d’une dissolution de l’Assemblée nationale si le gouvernement venait à être mis en minorité. Le désaveu d’Élisabeth Borne et ses ministres en décembre prochain ouvrirait donc la voie à des élections législatives anticipées.

Moratoire

Il y a encore quelques semaines, le cadre commun de la Nupes permettait au Parti socialiste d’envisager, a minima, la reconduction de ses députés. Mais depuis le moratoire décrété par Olivier Faure et ses amis, l’avenir n’est plus aussi rose. L’absence d’une candidature unique de la gauche au premier tour dans nombre de circonscriptions aboutirait à l’élimination de nombreux députés sortants. Seule La France insoumise serait assurée de limiter la casse. 

Alors, faute d’une motion de censure votée par l’ensemble des oppositions, quel est le scénario le plus probable pour ce projet de loi ? Du côté des Républicains, on ne désarme pas.

Il est hors de question pour nous de voter un texte qui aggraverait la situation de la France en matière migratoire. Et dans ce texte, au-delà de l’article 3, au-delà de l’article 4, il y a beaucoup d’autres mesures qui en réalité affaibliront un peu plus notre pays face à l’immigration. Si vous ouvrez ce droit à la régularisation dans ces termes-là, vous aurez plusieurs centaines de milliers de personnes qui seront régularisées. La gauche en 1981, son arrivée au pouvoir a régularisé 130 000 personnes. Je pense que monsieur Darmanin battrait les records.

Olivier Marleix, député d’Eure-et-Loir et président du groupe parlementaire LR, Assemblée nationale

Gérald Darmanin serait donc un dangereux gauchiste. Et dire qu’on ne le savait pas…

Rapport de force

Pas du tout, répond Sacha Houlié. À entendre le député de la Vienne, les plus laxistes en matière d’immigration ne sont pas ceux que l’on croit.

Monsieur Marleix a tort lorsqu’il dit cela, en revanche il a raison sur un point : c’est la première fois en vingt ans que nous parlons, les politiques, positivement d’immigration. Et si vous me demandez si j’en suis fier, oui j’en suis extrêmement fier. Par contre c’est aussi la première fois en vingt ans, et j’en suis extrêmement fier, que nous rétablissons la double peine pour les étrangers délinquants. Et je rappellerais simplement à monsieur Marleix que celui qui a supprimé la double peine, ce n’est nul autre que Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur.

Sacha Houlié, député Renaissance de la Vienne et président de la commission des lois, Assemblée nationale

Où en est-on du rapport de force ?

Les députés de la majorité y sont attachés. Il me semble que les députés du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires, ou plus simplement Liot, y sont aussi favorables, et que la gauche n’y est pas hostile. Donc ça fait une majorité autrement que celle des Républicains.

Sacha Houlié, Assemblée nationale

49-3 ?

Pour l’instant, si l’on se fie aux calculs du bloc présidentiel, il manque de quatorze à dix-huit voix pour que le projet de loi trouve une majorité à l’Assemblée nationale. Élisabeth Borne serait donc contrainte de recourir à l’article 49-3 pour faire adopter le texte. La routine, en quelque sorte. Après tout, on n’en est qu’à la quinzième utilisation de cette guillotine du débat démocratique. 

Les Républicains déposeraient alors leur motion de censure. Ou pas. Pour déposer une telle motion, il faut 58 signatures. Le groupe LR compte 62 députés. Sur le papier, c’est donc possible. Mais en politique, l’arithmétique est souvent contrariée. Olivier Marleix pourrait se heurter au refus de certains députés de son groupe qui considèrent que le texte du gouvernement n’est pas si négatif que ça. Il suffit de cinq défections pour que le scénario patiemment élaboré depuis plusieurs mois s’effondre. Une éventualité qui consacrerait la défaite politique des républicains. Et ouvrirait la voie à un éclatement du parti.

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