Porte-avions, budget : Emmanuel Macron se répète à cinq ans d’intervalle et Sébastien Lecornu essaie de ne pas couler

Emmanuel Macron, président de la République, le 21/12/2025 ©Élysée

Pour une nouvelle, c’est une nouvelle. La France va se doter d’un nouveau porte-avions en 2038.

A l’heure des prédateurs, nous devons être forts pour être craints et en particulier, forts sur les mers. Voilà pourquoi, conformément aux deux dernières lois de programmation militaire et après un examen complet et minutieux, j’ai décidé de doter la France d’un nouveau porte-avions. La décision de lancer en réalisation ce très grand programme a été prise cette semaine.

Emmanuel Macron, président de la République, le 21/12/2025

Cette annonce, on ne s’y attendait vraiment pas. Enfin, ceux d’entre nous qui sont nés après 2020, ce qui est un échantillon assez restreint, j’en conviens. Pour les autres, il y a comme un air de déjà vu.

Le Charles de Gaulle, vous le savez, arrivera à la fin de sa vie en 2038. C’est pourquoi, j’ai décidé que le futur porte-avions qui dotera notre pays et notre marine sera, comme le Charles de Gaulle, à propulsion nucléaire. Votre usine du Creusot, qui produit depuis longtemps des pièces essentielles à notre marine, produira, parmi d’autres, plusieurs pièces majeures de la chaufferie nucléaire du futur porte-avions en les forgeant, en les usinant ici même.

Emmanuel Macron, président de la République, le 21/12/2025

Président amnésique

On chipote. Le Président avait tout simplement oublié qu’il en avait parlé cinq ans plus tôt. Un porte-avions, c’est comme une voiture dans un parking, ça s’oublie facilement.

Le 14 novembre 2018, Emmanuel Macron est à Toulon. A bord du porte-avions Charles de Gaulle qui vient d’être rénové. Et voilà-t-y pas qu’il annonce à Gilles Bouleau de TF1, en plein journal de 20 heures, le lancement d’un programme pour un nouveau porte-avions nucléaire. On commence à tourner en rond. Ne ricanez pas. La charge mentale d’un président, c’est du sérieux. Un championnat d’haltérophilie permanent.

Notre amiral bien-aimé avait même oublié que sa ministre de la défense, Florence Parly, avait fait la même annonce, trois semaines plus tôt, à l’occasion du salon Euronaval au Bourget. Les cuisines de l’Élysée feraient bien de forcer sur les apports en vitamines si l’on veut que la mémoire flageolante de notre président ne se dégrade davantage. Imaginez qu’il ne retrouve plus les codes nucléaires…

Et puis il faut choisir. Vaut-il mieux un président qui radote plutôt qu’un président qui fait des promesses en l’air.

Oui, l’espérance, la prospérité et la paix du quart de siècle qui vient, dépendent de nos choix aujourd’hui. Et c’est pour cela qu’en 2025 nous continuerons de décider et je vous demanderai aussi de trancher certains de ces sujets déterminants. Car chacun d’entre vous aura un rôle à jouer.

Emmanuel Macron, président de la République, le 08/12/2020

Ça ne fait que 8 ans qu’il annonce un référendum. Et il y a fort à parier que ce 31 décembre, Emmanuel Macron remettra ça sur le tapis. Pourquoi se gênerait-il ? Plus personne n’écoute ce qu’il raconte. Si Emmanuel Macron se projette à l’horizon 2038 comme le premier Rafale venu, Sébastien Lecornu est beaucoup moins ambitieux. Survivre au débat budgétaire suffirait déjà à son bonheur.

Vendredi, les sept députés et les sept sénateurs qui composent la commission mixte paritaire ont constaté au bout d’une heure qu’ils ne parviendraient pas à se mettre d’accord. Les discussions sur le budget doivent donc se poursuivre. Mais la Constitution fixe une échéance. Le 31 décembre à minuit, les deux chambres doivent avoir adopté un budget. Ce qui est impossible avec les fêtes de fin d’année. Le char de l’État ne se transformera pas pour autant en citrouille.

Demain, mardi, les députés et les sénateurs devraient voter une loi spéciale. Elle autorise l’État à percevoir les impôts sur la base de l’année précédente et à financer les dépenses publiques essentielles. Y compris par l’emprunt. Le pays ne se retrouvera pas bloqué et les cartes Vitale continueront de fonctionner, n’en déplaise à Élisabeth Borne. Cette loi spéciale a une vocation transitoire. Le gouvernement veut que tout soit bouclé à la fin janvier.

Un : Est-ce qu’on est bien d’accord qu’entre maintenant et fin janvier il faut qu’on ait un budget ? Et la deuxième chose qu’on dit à tout le monde, et qu’on va dire à chaque acteur politique, c’est que pour qu’il y ait un budget, il faut qu’il y ait un compromis.

Amélie de Montchalin, ministre de l’Action et des Comptes publics, le 21/12/2025

L’exécutif a le choix. Soit il peut proposer un nouveau projet de loi, soit il continue la navette parlementaire. Pour Éric Coquerel, le président de la commission des finances, c’est la deuxième hypothèse qui est la bonne.

Comme j’ai entendu fin janvier, je pense que la solution qu’ils vont prendre ça va être de continuer la navette parlementaire avec l’actuel budget. Et si vous voulez mon pronostic, je pense que le gouvernement, là, va tenter un 49.3. Ils ont dû entendre le message d’Olivier Faure qui explique qu’un 49.3 sans accord préalable ça sera une censure. Ça veut dire qu’avec un accord préalable, ça peut passer.

Éric Coquerel, député « La France insoumise » et président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, le 22/12/2025

Le retour de la vengeance du 49.3

Le retour du 49.3 ! C’est le scénario qui tient la corde. Au moins pour le moment. Mais Sébastien Lecornu s’était engagé à ne pas y recourir. Qu’à cela ne tienne. Son entourage a trouvé la parade. Avec l’échec de la CMP et la loi spéciale, expliquent les relais du Premier ministre, on pourrait considérer que le débat budgétaire est terminé. Il s’agit de passer au vote. Et l’article 49.3 a d’abord été rédigé pour forcer le camp du Premier ministre à voter les projets de loi du gouvernement.

L’idée est la suivante : engager la responsabilité du gouvernement sur une version du budget qui pourrait devenir acceptable pour tout le monde à l’exception de la France insoumise et du Rassemblement national. Les Républicains, mais aussi les socialistes et les écologistes pourraient se défausser en disant qu’ils n’approuvent pas le budget final, mais que ce désaccord ne vaut pas le coup de censurer le gouvernement. Et le tour serait joué.

C’est ce que propose en substance le rapporteur général de la commission des finances, Philippe Juvin.

Je vais arriver avec ma liste, avec ma grande feuille, avec mon tableur Excel tout à l’heure devant le Premier ministre, en disant : Voilà, en commission mixte paritaire les forces politiques s’étaient mises d’accord sur ça, ça et ça. Voilà ce qu’il faut retirer, voilà ce qu’on va remettre. Le Premier ministre en fait sa copie. J’espère qu’il prendra nos demandes. Et il pourrait dire à l’Assemblée, mais c’est sa responsabilité : “Sur cette base, je fais un 49.3, j’engage la responsabilité du gouvernement”.

Philippe Juvin, député « Les Républicains » et rapporteur général du budget, le 22/12/2025

Mais voilà, les socialistes jugent que le compte n’y est pas. Il manque encore 10 milliards d’euros.

Nous allons, donc, continuer à poser ce que nous croyons juste pour les Français. Plus de justice fiscale, plus, aussi, d’évitement de tout ce qui est dans la partie deux du PLF correspond à des économies sur les services publics, sur des politiques publiques essentielles, je pense notamment à l’environnement.

Olivier Faure, député « Socialistes et apparentés » et Premier secrétaire du Parti socialiste, le 22/12/2025

Autrement dit, le catapultage de Sébastien Lecornu reste à l’ordre du jour. Avec une éventuelle dissolution de l’Assemblée nationale à la clé.

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