L’agenda contrarié du Rassemblement national

C’est pour l’instant l’angle mort de la discussion budgétaire qui s’ouvre. Depuis hier soir, le Rassemblement national est comptable devant l’opinion des mesures qui seront adoptées. Lui seul, en effet, peut faire tomber le gouvernement. S’il ne le fait pas à l’issue des débats, il devra assumer la politique menée par Michel Barbier.

Le peuple ou le patronat

Jusqu’alors, le RN était dans la position confortable du commentateur. Désormais, il a les mains dans le cambouis. Entre la posture sociale qu’il affiche depuis des années et sa quête de respectabilité dans les milieux patronaux, il va devoir choisir.

Cette perspective n’enthousiasme pas les cadres du parti. D’abord, parce que Marine Le Pen est accaparée par le procès des vrais faux assistants parlementaires. Quoi qu’elle en dise, elle est en situation de faiblesse. Ensuite, parce qu’on ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment comme François Mitterrand aimait à le répéter. Pour ratisser large, il faut rester dans le flou.

La censure ou la compromission

Comment éviter que les électeurs lepénistes n’aient le sentiment d’avoir été trahis ? Déjà, ils vivent mal de voir le RN jouer la béquille du gouvernement et de la droite. Si les députés du parti avalisaient la saignée que prépare le gouvernement, les dommages seraient énormes.

Mais voter la censure avec la gauche reste délicat pour le parti de l’ordre – du moins prétend-il jouer ce rôle. Car chacun pressent que le renversement du gouvernement ouvrirait une séquence d’instabilité. La gauche peut s’en accommoder. Pas l’extrême droite.

Tenir jusqu’à l’été prochain

Marine Le Pen et Jordan Bardella ne souhaitent pas ouvrir les hostilités avant que ne puissent être convoquées d’autres élections législatives. Si chaos il y a, il faut que celui-ci puisse les porter au pouvoir. Or, sauf à accepter d’aller à Matignon – mais pour quoi faire sans majorité à l’Assemblée – cela ne sera pas le cas avant juillet 2025. 

Un savant numéro d’équilibrisme s’annonce. Pas sûr que le funambule parvienne à terminer son numéro sans tomber du fil. 

Serge Faubert

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