Vous vous souvenez de ça ? C’était le 17 avril.
Le 14 juillet prochain doit nous permettre de faire un premier bilan. Nous avons devant nous cent jours d’apaisement, d’unité, d’ambition et d’action au service de la France.
Emmanuel Macron, président de la République, 17 avril 2023
Mais Emmanuel Macron n’a pas eu le temps de causer dans le poste. C’est la faute de Narendra Modi, le Premier ministre indien. À l’occasion du Forum économique franco-indien, Emmanuel Macron et lui ne se sont pas quittés d’une semelle.
Realpolitik
Nous vous élevons à la dignité de grand-croix de la Légion d’honneur. […] À travers vous, je veux saluer l’apport de l’Inde.
Emmanuel Macron, forum économique franco-indien au Quai d’Orsay, images de l’Élysée, 14 juillet 2023
Que voulez-vous, le chef de l’État ne pouvait pas abandonner son hôte. Jeudi 13 juillet, ce dernier a confirmé l’achat de 26 avions Rafale et 3 sous-marins Scorpène. Un client pareil, ça se soigne. D’autant que la France est le deuxième fournisseur des armées indiennes, derrière la Russie et surtout juste devant les États-Unis. Une bonne raison pour ne pas se montrer trop regardant sur la dérive autoritaire de l’Inde depuis que Narendra Modi est au pouvoir, ou s’émouvoir de sa proximité avec la Russie en guerre. Bienvenue dans le monde de la realpolitik.
Sébastien Lecornu, le moins mal aimé
Ça fait longtemps que la France entretient des relations singulières avec l’Inde, quel que soit le Premier ministre et chez nous quel que soit le président de la République. La deuxième des choses c’est qu’il faut bien comprendre que l’Inde est un des plus grands pourvoyeurs de sécurité dans l’océan Indien, qu’on y a des territoires, des intérêts très clairs, Mayotte, la Réunion, avec des concitoyens qu’il nous faut protéger. On a des bases militaires, à Djibouti, aux Émirats Arabes Unis.
Sébastien Lecornu, ministre des Armées, RTL, 14 juillet 2023
Sébastien Lecornu ! C’est justement le seul ministre qui trouve grâce aux yeux des Français. C’est ce que nous apprend un récent sondage Odoxa. 34 % souhaitent qu’il reste au gouvernement et 26 % qu’il parte. Par les temps qui courent, c’est une performance.
Ce même sondage Odoxa nous indique que les Français souhaitent le départ de la plupart des ministres. Incroyable ! Sont ainsi visés Gabriel Attal, Gérald Darmanin, Éric Dupont-Moretti, François Braun, Olivier Dussopt, Pap Ndiaye et Marlène Schiappa.
Candidats pour Matignon
Bruno Le Maire, lui, est sur le fil du rasoir : il y a autant de Français à souhaiter son départ que son maintien au gouvernement. Est-ce pour sauver la littérature ou l’économie, on ne sait ! Elisabeth Borne n’est pas davantage à la fête. 65 % des Français veulent que le président de la République change de Premier ministre. Un président qui trinque, lui aussi. 78 % des Français estiment qu’il n’a pas atteint les objectifs qu’il s’était fixés. Et 60 % auraient aimé qu’il prenne la parole après les émeutes. Bref, tout va bien.
Au cas où vous seriez un peu perdu, voici les candidats les plus sérieux pour Matignon. S’il y a remaniement, bien sûr. Il y a d’abord le chouchou du président : Julien Denormandie. Ancien ministre de l’Agriculture du gouvernement Castex, il avait annoncé en mai 2022 qu’il quittait la politique pour se consacrer à sa famille. Collaborateur d’Emmanuel Macron depuis l’époque où celui-ci était à Bercy, Denormandie se verrait bien à Matignon. Ça tombe bien, il se murmure que le chef de l’État envisage cette hypothèse.
Troisième mandat
Mais Gérald Darmanin et Bruno Lemaire sont en embuscade. L’un et l’autre briguent le poste et font tout pour flinguer le revenant. Ce n’est pas seul retour qui se prépare. Richard Ferrand, l’ancien président de l’Assemblée nationale, veut revenir sur le devant de la scène politique. Et il s’active. Comme on ne se montre jamais trop aimable, surtout avec Emmanuel Macron, il a suggéré, voici quelques semaines, qu’il serait bien que le président puisse faire un troisième mandat. Ce qui a fait bondir tout le monde. La Constitution l’interdit absolument.
Si le président n’arrive pas à trancher entre ces différents profils, il lui reste une solution. Suivre les recommandations de Jean-Louis Debré, l’ancien président du Conseil Constitutionnel. Voici ce qu’il a déclaré samedi 15 juillet dans les colonnes du Parisien :
Les Français n’ont rien à fiche des changements de ministres. D’ailleurs, on n’en connaît que quatre ou cinq ! […] Le président de la République peut dissoudre l’Assemblée nationale, organiser un référendum. Pour sortir de l’impasse politique actuelle, je pense que le retour au souverain, c’est-à-dire au peuple, s’impose.
Jean-Louis Debré, Le Parisien, 15 juillet 2023
Cependant, on voit mal Emmanuel Macron prendre le risque de se retrouver avec une centaine de députés en moins dans l’hémicycle. C’est dommage. Le geste n’aurait pas manqué de panache.
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