Petits meurtres entre amis

N’ayons pas honte de le dire, c’est un spectacle que l’on contemple avec gourmandise. L’élection législative partielle dans la 2e circonscription de Paris présente tous les ingrédients d’un de ces psychodrames chers à la droite. La machine à perdre est en place et elle monte doucement en puissance.

Et revoilà Barnier

Mardi dernier, Michel Barnier, Premier ministre remercié par l’Assemblée nationale, annonce sa candidature pour remplacer Jean Lassuq, député Renaissance déclaré inéligible le 11 juillet par le Conseil constitutionnel. Un LR à l’assaut d’une circonscription macroniste ! Un premier casus belli au sein d’un socle commun qui n’en finit pas de se désagréger. Mais le Savoyard a assuré ses arrières. Bruno Retailleau et la fédération de Paris des Républicains le soutiennent.

Le ménage façon Rachida

Deux jours plus tard, Rachida Dati, ministre de la Culture de l’actuel gouvernement, mais aussi du précédent – celui de Michel Barnier – laisse entendre qu’elle est prête à se porter candidate contre son camarade de parti. Car Dati a repris sa carte chez les Républicains en 2024.

Dans cette optique, la tourbillonnante ministre a demandé un rendez-vous à la commission d’investiture des Républicains. Celle-ci doit se réunir le 28 juillet.

Rachida Dati a également adressé un courrier aux adhérents de la capitale. Le message s’en prend, sans le nommer, à Michel Barnier, accusé de n’avoir jamais pris de risque.

La démarche interroge. Pourquoi vouloir siéger à l’Assemblée nationale quand on brigue la mairie de Paris ? Les élections municipales se dérouleront dans 8 mois. Les électeurs des 5e, 6e et 7e arrondissements – périmètre de la circonscription – ne manqueront pas d’être déconcertés par cette candidature pour un mandat éphémère.

Démêlés judiciaires

Mais la ministre affronte quelques menus tracas judiciaires. Elle est mise en examen depuis 2021 pour « corruption et trafic d’influence » dans l’affaire Carlos Ghosn. Et la justice s’intéresse maintenant à ses relations avec GDF Suez (devenu Engie) lorsqu’elle était députée européenne.

Une affaire suffisamment sérieuse pour que ses rivaux à droite et au centre envisagent qu’elle ne puisse être candidate à la mairie de Paris. Et déjà, certains voient Michel Barnier la remplacer au pied levé. L’intéressé a déclaré aujourd’hui qu’il n’avait aucune ambition municipale.

Quoi qu’il en soit, une victoire de Rachida Dati dans la 2e circonscription de Paris viendrait opportunément faire taire les critiques et relancerait la candidate dans sa campagne pour la mairie. Sa façon à elle de faire le ménage même si elle rappelait, il y a trois jours, à la sénatrice PS Marie-Pierre de la Gontrie qu’elle n’était pas, justement, sa femme de ménage.

Attal attaque !

La tragicomédie ne s’arrête pas là. Gabriel Attal n’entend pas laisser Les Républicains s’emparer d’une circonscription qu’il estime lui revenir. Il pousse donc la candidature de Clara Chappaz, l’actuelle ministre déléguée à l’intelligence artificielle et au numérique. Elle pourrait être investie dans les jours qui viennent par Renaissance.

On verrait donc deux ministres du gouvernement Bayrou s’affronter tandis qu’un troisième, Bruno Retailleau, pousserait la candidature du prédécesseur de l’actuel du Premier ministre… Même un scénariste retors n’oserait pas proposer pareille intrigue.

Le RN s’invite au bal

Et ce n’est pas tout. Le député européen Thierry Mariani, qui a quitté Les Républicains il y a cinq ans pour rejoindre le Rassemblement national, envisage de se présenter. Il l’a fait savoir dans les colonnes du Parisien. Jusqu’à présent, il ne briguait que la mairie de Paris. Mais l’occasion de défier Rachida Dati avant l’heure était trop belle.

La loi prévoit que l’élection partielle doit intervenir dans un délai de 3 mois. Soit en l’espèce avant le 11 octobre. Ce qui ne manquera pas d’alourdir l’ambiance politique. Car les députés seront alors en pleine discussion budgétaire. Et peut-être François Bayrou ne sera-t-il plus aux manettes. Renversé par une motion de censure ou bien démissionnaire. Préparez le pop-corn.

Serge Faubert

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