Dire qu’il y a quelque chose de profondément indécent dans le battage autour du livre de Nicolas Sarkozy, Journal d’un prisonnier, est un euphémisme. Voilà donc un homme condamné définitivement dans deux affaires – les comptes de sa campagne de 2012 et le dossier dit des « écoutes » – qui vient crier à l’injustice dans une troisième affaire, celle des financements libyens.
L’exécution provisoire est la règle
En première instance, l’ancien président de la République a été condamné à cinq ans de prison pour association de malfaiteurs assortie d’une exécution provisoire.
Lorsque la peine dépasse deux ans, l’exécution provisoire est la règle dans neuf cas sur dix.
D’ordinaire, on ne s’en émeut guère. Et si la justice peut avoir la main lourde, que dirait-on si un délinquant représentant une menace pour l’ordre public n’allait en prison qu’à l’issue de l’épuisement de ses voies de recours ?
Traitement de faveur
Là où d’autres demeurent des mois et des années derrière les barreaux en attendant l’appel, Nicolas Sarkozy est resté 21 jours à la prison de la Santé. Sans minimiser le choc psychologique de la détention, on conviendra qu’il y a des situations pires. Nicolas Sarkozy, pour sa propre protection, bénéficiait d’une cellule individuelle. Ses deux officiers de sécurité étaient logés à proximité. Il pouvait voir sa famille tous les deux jours et chaque soir le directeur de la prison venait s’entretenir avec lui. Les gardiens s’adressaient à lui en l’appelant président. Bref, au regard de la condition faite à n’importe quel détenu, Nicolas Sarkozy a bénéficié d’un traitement de faveur.
Construire une image de persécuté
L’ancien chef de l’État a pourtant choisi d’en faire la clé de voûte d’une bataille d’image, dans la perspective de son procès en appel à partir du 16 mars 2026. Il entend se présenter comme la victime d’une injustice criante. L’outrance ne l’ayant jamais étouffé, il va jusqu’à se comparer au capitaine Dreyfus.
Dreyfus à la rescousse
Pour mémoire, le capitaine Alfred Dreyfus, condamné en 1894 à la dégradation militaire et à la déportation perpétuelle sous l’accusation d’espionnage au profit de l’ennemi, a passé 4 ans au bagne de l’île du Diable en Guyane. 1517 jours exactement. Il lui faudra attendre 1906 avant d’être réhabilité.
Juges rouges
Mais la vérité historique importe peu à l’ancien président. Le but de ce journal d’un prisonnier est de suggérer que Nicolas Sarkozy est victime d’un règlement de comptes judiciaires. « Mon crime aujourd’hui serait-il de ne pas être de gauche ? » lâche-t-il au détour d’un paragraphe. Tout s’éclaire : il est victime d’une persécution orchestrée par les juges rouges.
Dédale judiciaire
Cette fable ne convaincra que ceux qui ont la flemme de se plonger dans le dédale des affaires où le nom de l’ancien président est cité. L’empilement des faits donne le vertige. Et l’on se demande comment pareil comportement a pu prospérer.
Le parrain est de retour !
Nicolas Sarkozy a durablement abîmé la fonction présidentielle. Qu’une partie des médias, à l’affût d’un bon coup, aient choisi, ces derniers jours, de le rétablir dans le rôle de l’arbitre des élégances à droite française laisse pantois. Un repris de justice pour parrain… Après tout, qui de plus logique !
Serge Faubert
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