Crise sociale : majorité, droite et extrême droite s’en prennent à LFI

Manuel Bompard, député des Bouches-du-Rhône et coordinateur de La France insoumise, à l’Assemblée nationale, avril 2023. ©Purepolitique

Emmanuel Macron est coincé. Sa cote de popularité rejoint presque la dégringolade qu’il avait enregistrée au plus fort du mouvement des gilets jaunes. C’est ce qu’annonce un sondage de l’Ifop pour Paris Match et Sud Radio.

À l’époque, le chef de l’État s’en était sorti par la répression à outrance et l’organisation d’un « grand débat ». La répression est toujours au rendez-vous. Quant au « grand débat », les Français l’attendaient à l’Assemblée nationale, mais l’exécutif a choisi de les en priver, de peur d’être battu à la loyale, c’est-à-dire par un vote démocratique. Résultat : le pays est bloqué.

Dissolution écartée

Dissoudre l’Assemblée nationale ? Sans doute Emmanuel Macron en a caressé l’idée. Mais tous les sondages concordent. Dans cette hypothèse, le groupe Renaissance et ses alliés se retrouveraient éparpillés façon puzzle. Mercredi 5 avril, une enquête de l’institut Elabe prédisait un Trafalgar pour la Macronie dans l’hypothèse d’une dissolution. La coalition Ensemble et ses alliés centristes perdraient autour d’une centaine de sièges. Le RN en gagnerait entre 61 et 86. La Nupes, elle, verrait ses effectifs renforcés par un apport de 19 à 49 députés. 

Emporté par son élan, Elabe s’est risqué à une simulation sur la présidentielle de l’année dernière. Dans cette nouvelle hypothèse, Marine Le Pen l’emporterait avec 55 % des voix sur Emmanuel Macron. Une simulation à prendre avec des pincettes. D’abord, parce qu’Emmanuel Macron ne peut plus être candidat. Ensuite, parce qu’entre le début et la fin d’une campagne présidentielle, les intentions de vote bougent énormément. Valérie Pécresse, Anne Hidalgo ou Yannick Jadot ne diront pas le contraire. 

Pas d’issue dans une dissolution, donc. Et côté syndicats, la porte est toujours verrouillée. Mercredi 5 avril, sur le perron de Matignon, l’intersyndicale n’a montré aucun signe de division ou de lassitude.

Exécutif enlisé

Nous avons choisi de mettre fin à cette réunion inutile dès lors que la Première ministre nous a indiqué qu’elle continuerait à gouverner contre le pays. Nous avons trouvé face à nous un gouvernement radicalisé, obtus et déconnecté.

Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, BFMTV, 5 avril 2023

L’exécutif est enlisé. Son dernier espoir réside dans la décision du Conseil constitutionnel, le 14 avril. Si les sages de la rue de Montpensier ne censurent que quelques dispositions accessoires de la loi, le pouvoir peut reprendre la main. Mais rien n’est sûr. Acculé, l’exécutif tente d’établir une nouvelle ligne de partage. Celle de la violence. Sans doute Emmanuel Macron rêve-t-il d’un renversement de l’opinion à la faveur du chaos dans lequel il a lui-même plongé le pays. Épouvantés par les grèves et les violences, les Français excédés verraient en lui l’ultime rempart.

La dernière fois que ce stratagème a fonctionné, c’était le 30 mai 1968. Une marée gaulliste avait envahi les Champs-Élysées, marquant la fin du mouvement étudiant et ouvrier. Mais pour jouer l’homme providentiel, encore faut-il en avoir les épaules. Emmanuel Macron n’est pas le Général de Gaulle. La seule libération à laquelle il ait concouru, c’est celle des marchés financiers. 

Bataille de mots

Cette bataille est d’abord une bataille de mots. Il s’agit de faire glisser la Nupes du tiroir de la gauche vers celui de l’extrême gauche. Avec le secret espoir de séparer ainsi le bon grain de l’ivraie, entendez les socialistes et les communistes des insoumis. Mais au fait, où se situe exactement La France insoumise ? Pure Politique a demandé à Manuel Bompard de nous éclairer. 

Mais vous savez, l’extrême gauche ça existe en France. Il y a des partis qui se revendiquent de l’extrême gauche. Lutte ouvrière c’est un parti d’extrême gauche, il se revendique comme tel, le NPA aussi. La France insoumise ne s’est jamais revendiquée comme un parti d’extrême gauche. Et du point de vue de ses propositions programmatiques, la retraite à 60 ans, l’augmentation du Smic, la planification écologique, je n’ai pas l’impression que ce soit des propositions qui soient des propositions extrémistes.

Vous voulez toujours faire la révolution ?

Mais bien sûr. La révolution citoyenne, la révolution par les urnes. Mais attention, parce que si ça devient extrémiste d’utiliser le mot révolution, qu’est ce que vous allez dire sur le président de la République ? Son premier livre s’appelait Révolution

Manuel Bompard, député des Bouches-du-Rhône et coordinateur de La France insoumise, Assemblée nationale

« Ceux qui soufflent sur les braises du mécontentement »

Ces considérations n’embarrassent ni les macronistes, ni la droite, ni l’extrême droite. Pour eux, les casseurs ou La France insoumise, c’est la même chose. Du moins, c’est la thèse qu’ils cherchent à accréditer dans l’opinion. Les échanges en commission des lois, mercredi matin, autour de la pétition demandant la dissolution de la BRAV-M, en ont fourni une bonne illustration. Pétition que la commission a d’ailleurs enterrée en grande pompe, soit dit au passage. 

Je pense qu’il faudra qu’on se saisisse un jour des dangers que ces groupuscules, qui sont soutenus par des groupes parlementaires ici-même, par des parlementaires qui étaient présents à une manifestation interdite, génèrent pour la République.

Éric Ciotti, député des Alpes-Maritimes et président du parti Les Républicains, Assemblée nationale, 5 avril 2023

Nous combattrons sans relâche ceux qui à l’extrême gauche attisent la haine, fracturent sciemment le corps social et soufflent sur les braises du mécontentement.

Éric Pauget, député LR des Alpes-Maritimes, Assemblée nationale, 5 avril 2023

« Gangréner les cortèges »

Depuis l’utilisation du 49-3 par madame la Première ministre, cette même extrême gauche, qui se veut de moins en moins républicaine, a appelé à bloquer le pays par la force s’il le fallait. D’ailleurs, un député qui était ici présent a légitimé l’utilisation de la force et de la violence pour faire tomber la réforme en cours, voire même le gouvernement.

Éric Mendes, député Renaissance de Moselle, Assemblée nationale, 5 avril 2023

Si nous pouvons noter qu’au début ces manifestations se déroulaient dans le calme, il n’aura pas fallu attendre longtemps pour que l’extrême gauche vienne gangréner les cortèges.

Romain Baudry, député RN des Bouches-du-Rhône, Assemblée nationale, 5 avril 2023

Cet amalgame entre La France insoumise et les casseurs peut-il abuser les Français ? Si l’on en croit les sondages qui soulignent tous une progression des amis de Jean-Luc Mélenchon, la réponse est non. Pour l’heure, la radicalité dans l’expression semble payer. Elle est à l’image de la colère qui secoue le pays.

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