Réarmement de l’Europe : les 27 valident un plan de 800 milliards d’euros

Emmanuel Macron, président de la République française, le 05/03/2025 ©Élysée

L’heure est donc au réarmement de l’Europe. Emmanuel Macron nous l’a confirmé mercredi soir.

L’Europe de la défense, que nous défendons depuis huit ans devient donc une réalité. Cela veut dire des pays européens davantage prêts à se défendre et à se protéger, qui produisent ensemble les équipements dont ils ont besoin sur leur sol, qui sont prêts à davantage coopérer, à réduire leur dépendance à l’égard du reste du monde. Et c’est une bonne chose. Et à travers les deux lois de programmation militaire que j’ai décidées et que les parlements successifs ont voté nous aurons doublé le budget de nos armées en presque dix ans.

Compte tenu de l’évolution de ces menaces, de cette accélération que je viens de décrire, nous aurons à faire de nouveaux choix budgétaires et des investissements supplémentaires qui sont désormais devenus indispensables. Ce seront de nouveaux investissements qui exigent de mobiliser des financements privés mais aussi des financements publics sans que les impôts ne soient augmentés. Pour cela il faudra des réformes, des choix, du courage.

Emmanuel Macron, président de la République française, le 05/03/2025

Ce jeudi, se tient à Bruxelles un Conseil européen. Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, présente son plan à 800 milliards d’euros. Ce plan baptisé Réarmer l’Europe prévoit de sortir du pacte de stabilité les dépenses militaires de chaque pays. En clair, elles ne seraient plus comptabilisées dans le déficit des États. Bye bye le seuil des 3 %. Par ailleurs, un emprunt de 150 milliards d’euros souscrit par la Commission européenne permettra aux pays qui ont des fins de mois difficiles de financer leurs menues emplettes : drones, missiles, munitions…

La liste des courses de l’armée française

Ce jeudi matin, sur France inter, Sébastien Lecornu a détaillé la liste des commissions pour la France.

Ce que je peux vous dire autrement, c’est que notre Marine nationale il lui manque de toutes les évidences au moins trois frégates, que notre aviation de chasse française, globalement, manque d’une vingtaine de rafales. Notre armée de terre a besoin de frappes dans la profondeur. On voit bien que la ligne de front, de plus en plus, est longue, étendue, et qu’il faut être capable de frapper en premier rapport.

Sébastien Lecornu, ministre des Armées, le 06/03/2025

Les Américains nous ayant abandonné comme une vieille chaussette, l’Europe ne peut compter que sur ses propres forces.

Notre allié américain, qui pendant des décennies a protégé le continent européen, se retire. Il fait le choix de l’isolationnisme. Il fait le choix d’un partenaire autoritaire, brutal, violent, qu’est la Russie de Vladimir Poutine. Et donc face à la démocratie européenne qui est assiégée aujourd’hui par les nationalistes, les populistes mais aussi les puissances autoritaires, il faut que nous nous réarmions.

Pieyre-Alexandre Anglade, députée EPR, le 04/03/2025

Nous étions prévenus cependant. Mais il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre.



Ce que disait Donald Trump, mais ce que disait aussi Barack Obama, ce que disait Joe Biden, c’est qu’à un moment le parapluie américain allait se redéployer vers, pour lui son adversaire c’est la Chine. Et donc les forces qui étaient en Europe, elles vont se redéployer ailleurs. Ils nous ont prévenu, les Américains, depuis longtemps en réalité.

Sylvain Maillard, député EPR, le 04/03/2025

Le Rassemblement national est d’accord pour que la France se réarme. Mais il ne veut pas entendre parler de l’Europe de la défense d’Emmanuel Macron. L’un des rares sujets sur lequel le président n’ait jamais varié depuis 2017. Ça mérite d’être souligné, non ?



Aujourd’hui on voit qu’il faut se réarmer parce que tout pays peut demain nous poser problème. Après, l’idée de l’Europe de la défense, qui est la nouvelle lubie des européistes, il faut rester, je crois, pour le moins circonspect.

Quelle Europe de la défense ? Quand on sait que 80 % des armements achetés par nos pays partenaires le sont aux Etats-Unis ou à l’étranger, et non pas en France. Quand on voit qu’on a parfois des visions géostratégiques différentes, je pense que là on est dans la lubie. L’Europe de la défense c’est endetter la France pour permettre à l’Allemagne de financer ses achats de matériel américain.

Laurent Jacobelli, député RN, le 04/03/2025

Il serait bien étonnant que l’Allemagne continue d’acheter des armes aux États-Unis. Quelques heures après sa victoire électorale, le futur chancelier Merz déclarait : « Ma priorité absolue sera de renforcer l’Europe afin que nous puissions, étape par étape, vraiment parvenir à l’indépendance vis-à-vis des États-Unis ».

La question du droit international

La France insoumise, elle, brandit le droit international pour récuser le plan d’Ursula von der Leyen.

Les traités européens sont clairs : la compétence défense n’appartient pas à l’Union européenne. Donc les annonces de madame Ursula von der Leyen, de nommer un commissaire à la défense, de créer une commission défense au sein du Parlement européen, vont à l’encontre des traités et sont donc une décision antidémocratique. Rien que pour cela, nous devrions être contre cette mesure qui ne respecte ni les traités, ni la souveraineté des peuples.

Bastien Lachaud, député LFI, le 04/03/2025

Par charité, on ne rappellera pas à Bastien Lachaud le nombre de fois où Jean-Luc Mélenchon, en campagne présidentielle, expliquait qu’il s’affranchirait des traités internationaux dans le cas où il entrerait à l’Élysée. Allez, juste un exemple. Par pure espièglerie.

A tous, qui voulez du “made in France”, vous êtes obligés de fermer les frontières sur certains produits. Très bien. Si vous voulez le faire, alors vous devez répondre à une question : Comment vous faites alors que c’est interdit par les traités européens. Interdit. Il faut sortir de ces traités en général.

Jean-Luc Mélenchon, le 14/11/2021

Sur le fond, il n’est pas inutile d’aller regarder ce que dit le Traité sur l’Union. Justement, le document prévoit que l’UE aille progressivement vers une politique de défense commune. C’est l’article 42.

Ursula von der Leyen n’est donc pas complètement hors-la-loi. Il n’en reste pas moins que Bastien Lachaud a formellement raison. A l’heure actuelle, l’Union européenne ne dispose pas de la compétence militaire.

L’Union européenne n’a pas la compétence défense. Ca, c’est vrai. Maintenant je rappelle qu’on a développé depuis plusieurs années des relations internationales. On a même un monsieur ou une madame, diplomatie européenne.

Mais au-delà de ça, rien n’empêche d’utiliser le cadre de l’Union européenne et même en complément des traités que nous pouvons avoir aujourd’hui qui régissent le fonctionnement des institutions pour aller au-delà, alors pas nécessairement avec la règle de l’unanimité, mais il y a un moment il faut quand même se poser la bonne question, mais on voit très bien où madame Le Pen et monsieur Mélenchon veulent aller. Eux, c’est “on ne s’engage dans rien, on considère que la Russie a été agressée”, je résume un peu, mais honnêtement si ce n’était pas à ce point excessif on pourrait presque en sourire.

Philippe Gosselin, député Droite républicaine, le 04/03/2025

Contournement des obstacles

Pour contourner les probables divisions au sein de l’Union européenne, les députés du MoDem proposent de mettre en place une Europe de la défense à deux vitesses.

On peut déjà, si chacun garde son armée et en faisant une coalition, en ayant des buts communs, agir. Et c’est vraiment le but. Après, au niveau de l’Union européenne, on sait qu’on va être à un moment ou un autre coincé par monsieur Orban.

Il va falloir qu’on trouve, un petit comme on a l’euro, on a l’Union européenne aux 27 et on a l’euro sur un certain nombre de pays. Je pense qu’il faut que sur la partie défense on ait aussi, peut-être, cette double utilisation en tout cas de l’Europe.

Mais on a vraiment besoin de réunir ceux et celles qui veulent continuer à être en soutien de l’Ukraine pour éviter que cette guerre, j’allais dire, se termine de la plus mauvaise des manières avec une victoire de la Russie.

Perrine Goulet, députée MoDem, le 04/03/2025

C’est bien beau de renforcer nos armées. Encore faut-il que le Parlement ait son mot à dire sur le sujet. C’est ce que rappellent les socialistes.

La loi de programmation militaire que nous avons votée en 2023 n’est plus suffisante. Et qu’il faut impérativement, urgemment, que les parlementaires français puissent se réunir pour rediscuter des contours de cette loi de programmation militaire au regard du nouveau contexte géopolitique, et que dans l’effort budgétaire il y ait évidemment adossé à cette loi de programmation militaire un véritable plan de financement de ces nouveaux efforts qui vont être demandés aux Français mais aussi plus largement aux Européens.

Mélanie Thomin, députée Socialistes et apparentés, le 04/03/2025

Aujourd’hui en fait, on est des va-t-en-paix. Mais dans un contexte de guerre, ceux qui sont des pacifistes, les bras ballants, sont ceux qui derrière préparent en fait la défaite et qui préparent finalement la victoire de ceux qui ne prônent que la guerre. On est dans une situation aujourd’hui où il y a un agresseur et un agressé. Ne pas défendre les agressés, c’est accepter la guerre. Et nous ne pouvons pas nous y résigner.

C’est pour cela, et Boris Vallaud l’a dit hier, que nous étions, comme pacifistes, résolus à mener l’effort de guerre pour pouvoir derrière négocier une paix durable.

Arthur Delaporte, députée Socialistes et apparentés, le 04/03/2025

Le grand Jaurès, amoureux de la paix

Arthur Delaporte ne le dit pas, mais il paraphrase le grand Jaurès. Oui, celui qui disait “Guerre à la guerre”. A gauche, on a un peu perdu de vue que cet amoureux de la paix ne refusait pas la guerre. En 1911, Jaurès fit paraître un ouvrage qui allait devenir une référence : “L’armée nouvelle”. Au point qu’un officier, du nom de De Gaulle, vingt ans plus tard, piocha quelques idées dans l’ouvrage du socialiste pour rédiger son propre livre : “Vers l’armée de métier”.

Car Jaurès n’était ni un pacifiste intégral ni un partisan de l’Union sacrée. Et pas davantage un zélateur des expéditions coloniales ou des guerres d’agression. Aller jusqu’au bout de la recherche de la paix en Europe et dans le monde était selon lui la meilleure façon de donner à la France les forces morales indispensables à la victoire militaire dans l’hypothèse où le conflit ne pourrait plus être évité. C’est bien de cela qu’il s’agit aujourd’hui.

Comment dissuader l’agresseur sinon en lui montrant qu’une offensive conventionnelle ou nucléaire se solderait par sa défaite. Si l’on veut qu’il s’asseye enfin à une table de négociation, c’est là le meilleur chemin.

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