Fabien Roussel n’exclut pas de travailler avec Bernard Cazeneuve

Fabien Roussel, député du Nord et secrétaire national du Parti communiste, à l’Assemblée nationale, avril 2023. ©Purepolitique

Devant la commission des lois, Gérald Darmanin a fait référence à la matinale de France Inter de mercredi 5 avril. L’invité en était Bernard Cazeneuve, ancien ministre de l’Intérieur puis Premier ministre de François Hollande. En s’abritant derrière lui, Gérald Darmanin espérait enfoncer un coin supplémentaire dans la Nupes. 

Moi je vais me permettre de lui citer France Inter, ça vous surprendra peut-être d’ailleurs, et Bernard Cazeneuve. Bernard Cazeneuve était à écouter ce matin, il était sur France Inter. Il a dit des choses importantes. Il a été ministre de l’Intérieur, vous le savez, au moment de l’affaire de Sivens. Il était Premier ministre et ministre de l’Intérieur au moment de la loi El Khomri, gouvernement que vous souteniez à l’époque. Je vous laisse entre Nupes, il n’y a pas de problème. À propos de LFI, monsieur Cazeneuve… C’est monsieur Cazeneuve, je ne voudrais pas que je sois attaqué d’ultra gauche, vraiment pas… Monsieur Cazeneuve a dit ce matin. On peut citer Bernard Cazeneuve sans être traité de fascite, je veux dire c’est possible ?

Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur

Costumes de notaire

Alors qu’a dit Bernard Cazeneuve ? Eh bien, il s’en est pris à La France insoumise. Comme d’habitude. 

Vous savez que c’est le parti de l’outrance. Maintenant on sait que c’est le parti de l’insulte. Paraît que c’est la gauche. Non, ce n’est pas ça la gauche. La gauche c’est le parti de ceux qui considèrent que quiconque ne pense pas comme soi doit être respecté. Jamais je ne tiendrai sur aucun de ceux dont je ne partage pas les orientations politiques ce type de discours.

Bernard Cazeneuve, ancien Premier ministre, France Inter, 5 avril 2023

C’est vrai. Drapé dans ses costumes de notaire fleurant bon la naphtaline, Bernard Cazeneuve n’a jamais insulté ses opposants. Il s’est contenté de les faire matraquer, encore et encore, lors des manifestations contre la loi travail en 2016. Allant jusqu’à vouloir interdire toutes les manifestations. Mais cela n’enlève rien à sa courtoisie, vous en conviendrez.

Étendre le rassemblement de la gauche

Personne n’aurait fait cas de ces propos s’il n’y avait eu Fabien Roussel. Dans L’Express, lundi 3 avril, le secrétaire national du Parti communiste français explique qu’il veut étendre le rassemblement de la gauche « bien au-delà » de la Nupes, qu’il juge « dépassée ». Et ce rassemblement, dit-il, pourrait aller jusqu’à Bernard Cazeneuve. L’intéressé a d’ailleurs confirmé au Parisien avoir rencontré le dirigeant communiste. Pure Politique a donc attrapé par la manche Fabien Roussel pour qu’il nous explique sa nouvelle stratégie. 

J’ai répondu à une question, on m’a interrogé sur lui, ce que je souhaite dire moi c’est que je ne ferme la porte à personne sur la base d’un projet, une ambition pour la France qui rompt avec ce système économique, avec le capitalisme. Et donc je ne veux pas mettre d’a priori sur qui que ce soit. C’est pour ça que je veux avoir les bras ouverts, la main tendue à toutes les personnalités de progrès et de gauche dans notre pays.

Fabien Roussel, député du Nord et secrétaire national du Parti communiste, Assemblée nationale

À contrepied

Une fois de plus, Fabien Roussel prend ses camarades à contrepied. Écoutez Pierre Dharéville. 

Nous, on essaie de construire un rassemblement. Nous pensons que ce rassemblement à gauche ne peut pas se faire sur la ligne défendue par François Hollande. Si c’est ça le sujet. Si vous voulez nous entendre dire ça, on peut vous le dire, très clairement.

Pierre Dharéville, député GDR-Nupes des Bouches-du-Rhône, Assemblée nationale

Message reçu. Cette remarque du député des Bouches-du-Rhône s’inscrivait dans une réponse plus générale sur Martine Froger, la dissidente socialiste élue dans l’Ariège, dimanche 2 avril, contre la députée sortante, l’insoumise Bénédicte Taurine.

Elle n’a pas sa place

En effet, la nouvelle députée se verrait bien siéger parmi ses camarades socialistes. Pour Pierre Dahréville, elle n’a pas sa place dans les rangs de la Nupes.

Ce qu’on considère c’est qu’elle n’a pas été élue sous l’égide de la Nupes. C’est une réalité formelle. D’ailleurs elle ne le revendique pas. Je ne suis pas certain que ça soit sa revendication à elle d’intégrer l’intergroupe Nupes. Vous nous posez une question dont on se demande si elle a lieu d’être en réalité.

Pierre Dharéville, Assemblée nationale

Sans surprise, la présidente du groupe LFI, Mathilde Panot tient le même discours. 

Je ne suis pas d’accord pour qu’une députée qui a fait battre une députée de l’intergroupe de la Nupes siège dans le groupe socialiste, et je suis sûr que beaucoup des socialistes seront d’accord avec moi sur cette question.

Mathilde Panot, députée du Val-de-Marne et présidente du groupe LFI-Nupes

Respect du cadre de la Nupes

Et les socialistes, ils en disent quoi ? Signe que la décision n’était pas simple, le point de presse habituel du mardi a été repoussé à plusieurs reprises. Et c’est finalement en coup de vent qu’Arthur Delaporte, un des porte-parole, est venu nous livrer la position du groupe : 

Nous ne cédons aux pressions d’aucune forme de quiconque. Nous sommes un groupe souverain, et nous souhaitons discuter sur la base des principes que nous nous sommes fixés : le respect du cadre de la Nupes, le respect des principes et des valeurs du groupe, la défense évidemment de l’union de la gauche. Ce sont des principes préalables mais nous sommes ouverts à la négociation sur ces bases.

Arthur Delaporte, député PS-Nupes du Calvados

Délai de veuvage

Si l’acceptation du cadre de la Nupes devient un préalable à son adhésion au groupe socialiste, Martine Froger ne peut décemment accepter. Comment expliquer à ses électeurs qu’elle va rejoindre une coalition électorale qu’elle a combattue. Il y a quand même un délai de veuvage à respecter…

Mardi 4 avril, l’intergroupe de la Nupes s’est réuni à l’Assemblée nationale. Officiellement, les désaccords entre les partenaires ne sont que tactiques. Mais une fois la séquence des retraites terminée, la coalition ne fera pas l’économie d’une remise à plat sur le programme et sur les échéances. 

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