Ce samedi après-midi, Jean-Luc Mélenchon a été entendu par la Commission d’enquête parlementaire « sur les liens existants entre les représentants de mouvements politiques et des organisations et réseaux soutenant l’action terroriste ou propageant l’idéologie islamiste ». Mise en place à l’instigation de Laurent Wauquiez, le patron des députés LR, cette commission ne vise en réalité qu’un seul mouvement, la France insoumise.
C’est sans doute une des raisons qui font que son bureau, contrairement à ce que prévoit le règlement de l’Assemblée nationale, ne reflète pas la configuration de l’hémicycle. Aucun député de gauche n’y siège. Le président est un député LR, Xavier Breton, et le rapporteur, Matthieu Bloch, appartient au groupe UDR.
Commission d’enquête anti LFI
Cette instance a commencé ses travaux au mois d’octobre. Et jusqu’à présent, il n’en est rien sorti de probant. Très attendue, l’audition de Nicolas Roche, secrétaire général du SGDSN (Secrétariat général de La Défense et la Sécurité nationale), le 6 novembre, a fait flop. Le haut fonctionnaire a déclaré n’avoir « aucune compétence » sur le sujet.
L’audition de Jean-Luc Mélenchon n’apportera aucune lumière particulière. Mais l’objectif n’est pas là. Il s’agit de diaboliser le mouvement – qui se débrouille très bien tout seul pour se tirer des balles dans le pied – à la veille des élections municipales.
Clientélisme électoral
Faute de grives, on mange des merles. Ces dernières semaines, une polémique est venue alimenter le procès de l’infiltration islamiste. Quitte à confondre le clientélisme électoral dont La France insoumise, à l’instar de tous les partis peut faire preuve, avec la subordination à une idéologie religieuse.
Début octobre, Cédric Brun, un militant insoumis de Denain, conseiller régional et ancien représentant syndical CGT de PSA dans le Valenciennois, a été poussé vers la sortie après avoir dénoncé l’arrivée de « profils inquiétants » dans les rangs de l’organisation.
Profils inquiétants
En l’occurrence, Soufiane Iquioussen et Youssouf Feddal, ami d’enfance du premier. Soufiane Iquioussen n’est autre que le fils de l’iman Hassan Iquioussen, expulsé en 2022 pour « des actes répétés de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence envers les Juifs, les femmes et les non-musulmans ». À l’époque, David Guiraud, le député LFI de Roubaix avait largement pris fait et cause pour l’Imam.
Du PS à LFI
Mais rien n’est simple. Soufiane Iquioussen et Youssouf Feddala ont fait leurs premières armes politique au Parti socialiste. Le second siégera même au conseil municipal de Denain.
En 2024, voilà qu’ils frappent à la porte du groupe LFI de Denain. L’accueil est plutôt frais. On se souvient que Soufiane Iquioussen a participé à la Manif pour tous, le mouvement opposé au mariage pour tous. Les deux hommes finiront par monter leur propre groupe d’action insoumis avec l’aval de la direction nationale. Ils devraient être candidats lors des prochaines élections municipales.
Opportunisme
Qu’on soupçonne le duo d’être guidé par un opportunisme sans limite ne suffit pas à le transformer en tête de pont d’une infiltration des Frères musulmans. Factuellement, le dossier reste mince.
En revanche, la cabale montée contre Cédric Brun est plus inquiétante. Cette figure historique du mouvement est aujourd’hui taxée d’islamophobie et de dérive idéologique droitière. Excusez du peu. La démocratie reste décidément un combat à LFI.
Nouvelle France
Ces derniers mois, Jean-Luc Mélenchon a théorisé le concept de Nouvelle France. Dans cette approche, la jeunesse des quartiers populaires tient un rôle central. Le leader insoumis estime qu’il pourrait trouver là les voix qui lui ont manqué en 2022 pour être au second tour de la présidentielle. Que dans ce cadre le mouvement ne se montre pas trop regardant sur les profils qui peuvent le rejoindre n’a rien de surprenant. Que la laïcité ne soit plus la pierre angulaire du discours de LFI ne l’est pas davantage. En revanche, la preuve d’une instrumentalisation du mouvement par une obédience religieuse reste à apporter. En dépit des efforts de Laurent Wauquiez.
Serge Faubert
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