La planète redoutait une troisième guerre mondiale. Une guerre dont l’Ukraine aurait été le déclencheur. Mais c’est des États-Unis qu’est venu ce conflit, pour l’heure, purement commercial. Renouant avec l’isolationnisme qui fût le sien à la fin du XIXe siècle, l’empire américain espère ainsi retrouver son âge d’or. Celui où des droits de douane à hauteur de 50 % protégeaient une industrie encore fragile.
La nouvelle administration estime que l’augmentation des taxes sur les produits étrangers générera chaque année 600 milliards de dollars. Une recette fiscale qui permettra de réduire d’autant l’imposition du citoyen américain.
Stephen Miran, l’idéologue
Stephen Miran, l’économiste qui murmure à l’oreille de Donald Trump, est persuadé que la politique du dollar fort est la cause de tous les maux. Elle serait à la source du déficit commercial et de la désindustrialisation des États-Unis.
Il faut donc rendre le dollar moins attractif. En quelque sorte, décourager les investisseurs d’acheter de la dette américaine. L’idée générale est de les contraindre à échanger les bons du Trésor à court terme contre des obligations à très long terme.
Le chantage américain
Pour atteindre cet objectif, Stephen Miran recommande de mettre en balance le parapluie militaire américain et une éventuelle baisse des droits de douane. En clair, les États-Unis disent au monde entier : faites ce qu’on vous demande et la situation rentrera dans l’ordre.
Mais ce bras de fer génère déjà le chaos. Les mesures de rétorsion commencent. Taxée à 34 %, la Chine a décidé d’appliquer des droits de douane identiques aux importations américaines.
Récession mondiale
L’incertitude sur les échanges a déclenché un vent de panique chez les investisseurs. Jeudi, Wall Street a perdu 2 500 milliards. Les bourses française, allemande, japonaise dévissent. Tout le monde vend. Ce qui fait plonger davantage le cours des actions.
C’est la récession mondiale qui menace désormais.
L’Europe en ordre dispersé
Ce contexte appelle une réaction unie des Européens. Si l’on se réfère aux déclarations de Laurent Saint-Martin, le ministre du Commerce extérieur, Emmanuel Macron et le gouvernement sont sur une position de fermeté. Installer un rapport de force est la seule façon de contraindre Donald Trump à négocier.
À l’inverse, Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission, penche pour des négociations immédiates avec les États-Unis, sans mesures de rétorsion immédiates.
Elle compte également sur le partenariat stratégique signé vendredi entre l’UE et les pays d’Asie centrale (Kazakhstan, Kirghizistan, Tadjikistan, Turkménistan et Ouzbékistan). Ce partenariat garantit l’accès aux terres rares. Ce qui permet de s’affranchir des Américains et des Chinois.
Pas de rabot dans les dépenses publiques
En France, le ministre de l’Économie et des finances, Éric lombard, a laissé entendre qu’il était prêt à laisser filer le déficit de la France si la situation internationale continuait à se détériorer. Il n’y aura pas « de coup de rabot supplémentaire à la dépense publique » en cas de ralentissement économique, a-t-il déclaré au micro de BFM vendredi.
François Bayrou estime cependant que des dizaines de milliers d’emplois sont menacés dans l’agriculture ou la viticulture par l’augmentation des droits de douane américains. À terme, ce sont des filières entières qui pourraient disparaître.
Moins spectaculaire et moins sanglant qu’un conflit militaire, la guerre que vient de déclencher Donald Trump est en train de remodeler les rapports entre les empires. La mondialisation heureuse est terminée. L’Europe, déjà sommée de se réarmer doit maintenant trouver les moyens de défendre son marché intérieur et ses industries. Le chemin est escarpé.
Serge Faubert
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