Mercredi 19 octobre, Élisabeth Borne a recours à l’article 49-3 de la Constitution pour la première fois depuis la nouvelle législature. Mais ce scénario risque de se répéter plusieurs fois dans les semaines à venir.
« Sur le fondement de l’article 49, alinéa 3 de la Constitution, j’engage la responsabilité de mon gouvernement pour la première partie du projet de loi de finance pour 2023. » Ces mots prononcés par la Première ministre, Élisabeth Borne, le 19 octobre dernier, annonce la couleur. En l’absence de majorité absolue, elle choisit d’abréger les débats sur le vote du budget. Et en l’absence de majorité, il y a fort à parier que la Première ministre garde ce discours à portée de main.
En effet, l’article 49-3 devrait connaître son heure de gloire dans les semaines à venir. Au gré des navettes entre l’Assemblée et le Sénat, le gouvernement pourrait être contraint d’engager sa responsabilité à plusieurs reprises. Jusqu’à trois fois dans le pire des cas. Et cela, pour la seule partie recettes du projet de loi de finances. Si le même scénario venait à se reproduire sur la partie dépenses du budget puis sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, on pourrait frôler la dizaine de recours à l’article 49-3.
Depuis la révision constitutionnelle de 2008, le recours au 49.3 est limité à un seul texte de loi par session parlementaire, sauf pour les projets de loi de finance (PLF) et de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), pour lesquels le gouvernement peut y recourir sans limite.
Motions de censure pour la gloire
Bien évidemment, l’opposition peut déposer, pour chaque 49-3 déclenché, une motion de censure. Celle-ci doit être remise auprès des autorités compétentes dans les 24 heures suivant le recours à l’article. Pour qu’elle soit retenue, la motion doit être votée par la majorité des députés. Si tel est le cas, la loi visée par le 49-3 est rejetée, et le gouvernement est renversé.
Dans le cas de la législature actuelle, la composition de l’hémicycle ne permet pas l’adoption des motions de censure. En effet, le groupe Renaissance compte 200 députés (apparentés compris), la Nupes (LFI, PS et EELV réunis) rassemble 151 élus, le RN recense 89 députés, le Modem 51, Les Républicains 62, le groupe LIOT (Libertés, Indépendants, Outre-Mer et Territoires) enregistre 20 députés, le groupe Horizons 30. Pour obtenir la majorité de 289 voix, l’opposition Nupes/RN doit donc s’allier et rallier les députés des groupes habituellement solidaires du gouvernement. Bref, ça n’est pas gagné.
Gouverner à coups de 49-3 ?
Le calcul des 10 recours à l’article 49-3 est bien sûr théorique. Car, politiquement, c’est intenable. La crise démocratique se transformerait en crise de régime. L’exécutif ne peut indéfiniment faire passer ses projets de loi en utilisant la disposition la plus brutale de la Constitution, sauf à transformer la France en république bananière.
Il ne restera alors d’autre solution pour Emmanuel Macron que la dissolution de l’Assemblée nationale. Avec toutes les inconnues que cela comporte. Jupiter joue avec le feu.
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