Ces jours-ci, la Commission des finances a des allures de laboratoire. Laboratoire de ce qu’aurait pu être un gouvernement de compromis entre le Nouveau Front Populaire, le MoDem et le groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (LIOT).
À plusieurs reprises, les députés appartenant à ces trois groupes se sont retrouvés pour voter quelque 170 amendements sur le projet de loi de finances pour 2025.
Ils ont tantôt reçu l’appui des députés RN, tantôt le soutien de la Droite républicaine de Laurent Wauquiez.
Détricotage en règle
À la sortie, le budget, préparé dans la hâte à Matignon et Bercy, est méconnaissable. Qu’on en juge : la contribution sur les hauts revenus (CDHR) qui ne devait s’appliquer que pendant trois ans a été pérennisée ; le prélèvement forfaitaire unique (PFU) aussi appelé « flat tax » est passé de 30 % à 33 % et la taxation des superdividendes, déjà votée en 2023, mais gommée par un 49-3, a été rétablie.
Les articles visant à geler ou raboter leurs recettes des collectivités territoriales ont été supprimés. Les députés ont même été jusqu’à gratifier ces dernières d’une rallonge de 500 millions d’euros.
Pas d’augmentation des taxes
Ils ont encore rejeté la hausse de la taxe sur l’électricité qui devait rapporter 3 milliards d’euros, l’augmentation de la taxation sur les chaudières à gaz et du malus automobile.
L’« exit tax », impôt créé en 2011 par Nicolas Sarkozy pour freiner l’exil fiscal des contribuables a été renforcé. Au grand dam des macronistes qui l’avaient baissé à leur arrivée au pouvoir.
Enfin, le Crédit impôts recherche, décrié de tous côtés, a été raboté. Les entreprises de la finance et de l’assurance en ont été écartées de son bénéfice.
55 milliards de recettes fiscales
Aux dires d’Éric Coquerel, le président de la commission, ce serait ainsi 55 milliards de recettes fiscales qui auraient été dégagées.
Bien sûr, ces votes n’ont qu’une portée limitée. Lundi, l’Assemblée entamera l’examen du projet de loi en séance publique. Et c’est la version initiale du texte qui sera soumise aux députés. Rien ne dit que les convergences apparues en commission se répéteront.
Effrayés par leur audace, les députés rejettent le budget amendé
D’ailleurs, paradoxe de l’exercice, les députés de la Commission des finances ont finalement rejeté le texte qu’ils ont amendé pendant quatre jours. Si le NFP a voté pour le projet de loi remanié, le RN et ses alliés ciottistes, le bloc central et le groupe LIOT ont estimé que l’addition fiscale était trop élevée.
Il n’en reste pas moins vrai que ces conjonctions dans les votes ont démontré que le parlementarisme reprenait ses droits. Faute de majorité absolue, le gouvernement va devoir s’accommoder de députés que plus rien ne bride. C’est bien le problème de Michel Barnier. Son socle s’est réduit comme une peau de chagrin. Et, déjà, à l’horizon du budget, se profile l’article 49-3. Avec le possible renversement du gouvernement à la faveur d’une motion de censure…
Serge Faubert
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