Le pays n’a pas de budget. Mayotte attend sa loi spéciale. La Nouvelle-Calédonie s’enfonce dans la crise. Les plans sociaux se multiplient et les prévisions de croissance de l’économie française restent en deçà de 1%. Mais le Conseil des ministres qui s’est tenu ce vendredi matin n’avait aucun point inscrit à l’ordre du jour. De cette réunion destinée aux caméras, il n’est sorti aucune annonce qui puisse parer aux urgences. François Bayrou continue de prendre son temps et avec lui Emmanuel Macron. Pour tout viatique, on a eu droit aux incantations de circonstance. « Faites preuve d’audace » a dit le président à ses ministres. « Il y a un chemin », a déclaré de son côté le Premier ministre en référence au budget.
Le chemin de croix
Un chemin ? Mais lequel ? Il faudra patienter une dizaine de jours pour connaitre l’itinéraire et la destination. C’est mardi 14 janvier que François Bayrou fera sa déclaration de politique générale devant les députés. Dans l’intervalle, Éric Lombard, le nouveau ministre de l’Économie et des Finances aura reçu les présidents des groupes parlementaires. Qui lui répèteront ce qu’ils ont déjà dit à ses prédécesseurs.
Marier l’eau et le feu
Une visite de courtoisie davantage qu’une co-construction. Car que peut-on construire entre un bloc qui veut tailler dans les dépenses publiques pour réduire le déficit budgétaire et un bloc qui, au contraire, veut mettre à contribution les grands groupes et les plus fortunés des citoyens pour rétablir les comptes et reconstruire les services publics ? Comme l’eau et le feu, tout sépare ces deux politiques. Elles sont inconciliables. Ce sera forcément l’une ou l’autre. Et pour l’instant, ce sont les libéraux qui l’emportent sur les keynésiens.
Le pari de la lassitude
Emmanuel Macron l’a rappelé lors de ses vœux, il n’entend pas abandonner la politique de l’offre. Par déni sur son absence de résultats et parce qu’il compte bien sur la lassitude générale pour s’accrocher au peu de pouvoir qui lui reste.
La fatigue des Français est réelle. Mais la colère pourrait prendre le dessus. En juin et juillet 2024, une majorité d’électeurs – si l’on additionne les voix du Rassemblement national et du Nouveau Front Populaire – s’est prononcée pour une rupture franche avec la politique menée depuis sept ans. Six mois plus tard, ceux qui ont conduit le pays au naufrage prétendent encore tenir la barre. Comme si rien ne s’était produit.
Des institutions au bout du rouleau
Les institutions permettent cet outrage à la démocratie. Mais la légalité sans la légitimité populaire n’est qu’un simulacre fragile. Un village Potemkine. Qu’on ne s’y trompe pas, nous sommes entrés dans une crise de régime. Les institutions se révèlent incapable de réguler la dispute citoyenne. Et c’est le consentement à l’autorité qui est maintenant questionné.
Le calme qui précède les tempêtes ?
Pour l’heure, il n’y a ni banderoles ni cortèges dans les rues. Et pas davantage de barricades. Mais qui peut prétendre, au regard de la crise sociale, que ce calme va perdurer. En s’enfermant dans son mépris du suffrage universel, le pouvoir prépare une catastrophe. Et personne ne peut se réjouir que la République, même si elle est aux mains d’irresponsables, s’effondre.
Serge Faubert
Soyez le premier à commenter