Le retour en fanfare de Marine Le Pen

Ceux qui avaient déjà relégué Marine Le Pen au magasin des accessoires en seront pour leurs frais. La présidente du groupe Rassemblement national à l’Assemblée est de retour et le fait savoir. 

Sonnée 

Sonnée par la disparition de son père puis sa condamnation dans l’affaire des assistants parlementaires, Marine Le Pen donnait, ces derniers temps, le sentiment de passer la main. En parallèle, le dauphin, Jordan Bardella, tentait de s’affirmer. On l’a vu à Rome lors des obsèques du Pape. Au Parlement européen, il s’est fendu d’un hommage appuyé au pontife disparu, n’oubliant pas de rappeler que la France restait « la fille aînée de l’Église ». Marine Le Pen, elle, restait muette. Déjà la classe politique rédigeait les faire-part.

Toujours dans la course à l’Élysée

En 72 heures tout a changé. Depuis la Nouvelle-Calédonie, elle a rappelé que sa détermination restait intacte malgré la peine de cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire qui la frappe.

Interrogée sur les consultations que mènera le chef de l’État à la mi-juin sur l’avenir de l’archipel, elle a déclaré « Je crois que ce serait une bonne chose que je puisse participer effectivement à ces consultations (…) demain je peux être amenée, si je suis élue, si les Français me font confiance, à avoir une part active dans les décisions qui pourraient être prises ». Le message est transparent : je suis toujours dans la course à l’Élysée.

Pas de numéro un bis dans le parti

Un peu plus tard, elle a rétabli la hiérarchie dans le parti. Interrogée sur la présence éventuelle de Jordan Bardella à ses côtés lors de ces entretiens avec le président de la République, elle s’est montrée cinglante : « Je ne suis pas sûre que Jordan pour le coup connaisse très bien les problèmes de la Nouvelle-Calédonie. On partage nos talents ». Sous-entendu, il a encore des progrès à faire.

Pour Marine le Pen, il n’y a qu’un numéro un au RN : elle-même. Jordan Bardella, en revanche, considère qu’il n’est pas le numéro deux, mais le numéro un bis. En quelque sorte l’équivalent de Marine Le Pen. N’est-il pas appelé à la remplacer, le cas échéant ?

La phrase de Marine Le Pen a fait mouche. Le président du RN s’est empressé d’affirmer qu’il n’y avait pas « une feuille de papier à cigarette » entre eux. Hors de question de jouer l’escalade comme Bruno Mégret avait pu le faire avec Jean-Marie Le Pen au milieu des années 1990.

La menace de la censure

L’exécutif a également eu droit à son avertissement. Marine Le Pen le menace d’une motion de censure s’il venait à augmenter les impôts comme il en a l’intention avec la TVA dite sociale. S’il persiste dans cette direction, François Bayrou connaîtra le même sort que Michel Barnier, a-t-elle pronostiqué devant les caméras.

Il serait faux de croire que la chute du gouvernement conduirait immanquablement à la dissolution de l’Assemblée nationale. Si Emmanuel Macron retrouvera bien la prérogative de renvoyer les députés devant les électeurs à partir du 8 juillet, cette option reste cependant périlleuse.

La proximité des municipales rend hasardeuse une dissolution

Les élections municipales se dérouleront en mars de l’année prochaine. Si la dissolution intervenait à l’automne, à l’occasion du débat budgétaire, cela impliquerait d’organiser à trois mois de distance les élections législatives et municipales. Chaos politique assuré. Dont la responsabilité incomberait au Chef de l’État. Qui plus est, il n’est pas impossible que de nouvelles élections législatives reproduisent, peu ou prou, la tripartition actuelle. Où serait le gain politique ?

C’est le pari que fait Marine Le Pen : Emmanuel Macron n’osera pas dissoudre l’Assemblée nationale.

Signal judiciaire

Reste l’hypothèque de son avenir judiciaire. Celui-ci pourrait bien s’éclaircir. La Cour de Cassation vient en effet de rappeler, dans une décision concernant Hubert Falco, l’ancien maire de Toulon, que l’application d’une mesure d’exécution provisoire à une peine d’inéligibilité devait être motivée. Et surtout, que les magistrats devaient s’assurer que cette décision constituait bien « une atteinte proportionnée à l’exercice d’un mandat en cours et à la préservation de la liberté de l’électeur ».

Un rappel qui dessine pour Marine Le Pen un horizon judiciaire plus favorable. La Cour d’appel qui statuera avant l’été 2026, pourrait avoir à cœur de ne pas priver le corps électoral de la possibilité de voter pour la candidate du RN. Sans doute est-ce là une des raisons qui explique le tonitruant retour de celle-ci sur la scène politique.

Serge Faubert

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