François Bayrou renonce à entrer au gouvernement

Le 8 février, François Bayrou vient expliquer au micro de FranceInfo pourquoi la veille au soir, il a renoncé à entrer au gouvernement ©FranceInfo

François Bayrou a donc décidé de claquer la porte d’un gouvernement qu’il n’avait pas encore rejoint. Ce n’est pas le moindre paradoxe de la comédie de boulevard qui s’est jouée hier soir. Dans un communiqué à l’AFP, le président du MoDem explique sa décision par l’absence « d’accord profond sur la politique à suivre ».

Ce matin sur France info, il a énuméré les raisons qui l’ont poussé à ne pas rejoindre le gouvernement :

Un déséquilibre politique. C’est-à-dire avec le sentiment qu’il y a certaines sensibilités de la majorité qui occupent l’espace.Ce que je vois, moi, c’est la multiplication des indices selon lesquels la crise on ne va pas l’équilibrer, on ne va pas l’arrêter, mais on fait comme si elle n’existait pas.

Diable, François Bayrou viendrait-il de s’apercevoir que le macronisme s’est singulièrement déplacé à droite ? Aurait-il découvert que 8 des 14 ministres déjà nommés sont issus de cette même droite ? Et que le pays va dans le mur sans que personne ne donne un coup de volant ?

Désaccord sur le nombre de ministres

Ça, c’est de l’habillage a posteriori pour les médias. La réalité est plus triviale. Fort de sa récente relaxe dans l’affaire des assistants parlementaires, le Maire de Pau réclamait six portefeuilles dans le gouvernement Attal On ne lui en a proposé que 4. Pour lui-même, François Bayrou exigeait le maroquin de l’Éducation nationale. Avec le rang de ministre d’État et la position de numéro deux dans l’ordre protocolaire. Pour la marque de la voiture de fonction, on cherche encore…

Toujours est-il Gabriel Attal ne lui a proposé que le ministère des Armées. Excusez du peu.

Suprême humiliation, pour prendre en charge l’Éducation nationale le président de la République préférerait Nicole Belloubet au maire de Pau, Celle-là même qui avait remplacé François Bayrou à la justice quand il avait été contraint de démissionner de son poste de Garde des sceaux en 2017.

Égo blessé

Un affront. Du coup, le patron des centristes a renversé la table, plongeant la Macronie dans une crise inattendue. Faut-il le rappeler, le bloc présidentiel ne dispose que d’une majorité relative à l’Assemblée. Et voilà que le bloc en question se fracture.

Certes, hier soir, au cours d’un dîner des députés MoDem, il a été acté que le parti et son groupe parlementaire restaient dans le camp présidentiel. Mais il y a plusieurs façons de soutenir un gouvernement. Gageons que le principal allié du président de la République va maintenant se sentir pousser des ailes. Et faire comprendre à l’exécutif que rien ne peut se faire sans lui.

La rancune de Gabriel Attal

François Bayrou ne voulait pas de Gabriel Attal à Matignon. Trop jeune, trop parisien avait-il mis en garde Emmanuel Macron. Le Président est passé outre. Mais le nouveau Premier ministre se montre rancunier. D’autant que tout le sépare du vieux centriste. À commencer par la génération.

Comment ces deux-là auraient-ils pu cohabiter ? Gabriel Attal a déjà fort à faire avec Gérald Darmanin et Bruno Le Maire qui réfèrent directement à l’Élysée. Pas besoin d’un troisième poids lourd qui vienne contester son autorité à tout bout de champ.

Les 51 députés du MoDem vont-ils s’aligner sur leur chef ? Hier soir, Jean-Louis Bourlanges, président de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, aurait apostrophé le maire de Pau en ces termes : « tu nous fous dans la merde !« . Il est vrai que le propre du centriste, c’est de servir de force d’appoint. Pas de faire cavalier seul.

Mais d’autres députés sont en accord complet avec François Bayrou. Comme Richard Ramos qui, hier soir, faisait étalage de son ras-le-bol :

On a, aujourd’hui notamment, un gouvernement qui est de droite et qui est parisien. Il n’y a pas un ministre au sud de la Loire. Il n’y a pas un ministre comme moi… Je ne veux pas être ministre donc c’est très clair, je leur parle trop mal… qui représente les vrais gens, pardon de dire ça comme ça, les gens des villages.

BFMTV 7/02/2024

L’Élysée a désormais deux possibilités. Tenter des débauchages individuels en proposant des strapontins gouvernementaux aux élus du MoDem. Ou bien, au contraire, entériner le divorce en réduisant la participation du MoDem à celle d’un sandwich SNCF, un jour de grève. Essayez, vous m’en direz des nouvelles…

Pour l’instant, le débauchage a la faveur de l’exécutif.

Dernière inconnue, les Européennes. Le MoDem va-t-il présenter une liste indépendante ou bien rester dans le cadre d’une liste commune avec Renaissance et Horizons ? S’il est un scrutin où ce parti européiste peut triompher sans passer par une alliance, c’est bien celui-ci.

Toujours candidat à la présidence de la République

En revanche, pour 2027, on est fixé. François Bayrou est déjà dans les starting-blocks. Voici ce qu’il répond quand on l’interroge sur sa candidature :

Je n’ai jamais renoncé à aucun des devoirs qui sont les miens, aucune des responsabilités qui sont les miennes.

Dire que ça va continuer comme ça pendant trois ans encore…

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