Même le MoDem hésite à monter dans la barque. C’est dire combien le gouvernement qui se profile met le cap à droite toute. Michel Barnier n’est pas le plus blâmable dans l’histoire. Homme de droite, il compose un gouvernement de droite. Si cela choque, il ne fallait pas l’appeler à Matignon. C’est d’ailleurs ce qu’il a indiqué à Emmanuel Macron lorsqu’il lui a soumis, jeudi, la première ébauche de son gouvernement. Le chef de l’État trouvait que Les Républicains prenaient la plus grosse part du gâteau.
Mais ces derniers auraient été bien bêtes de ne pas pousser leur avantage. Pour que le nouveau gouvernement n’apparaisse pas comme la simple reconduction de l’ancien, il fallait à tout prix accréditer la fable d’une coalition, supérieure en nombre, à celle du Nouveau Front Populaire.
Carte à jouer
Laurent Wauquiez et ses amis, qui, encore en juillet, juraient rejeter toute coalition, n’ont pas été longs à comprendre qu’ils avaient une carte à jouer. Un président affaibli, un bloc central battu, un Rassemblement national qui se donne un délai avant de voter la censure. Il y avait un chemin.
France réactionnaire
À condition de montrer patte blanche. Cela n’a pas été le cas. La perspective de retrouver Bruno Retailleau au ministère de l’Intérieur épouvante le MoDem. Car l’actuel président du groupe LR au Sénat est un condensé de la pensée réactionnaire. Il adhère à la théorie du grand remplacement, est partisan de l’abrogation du mariage pour tous et adversaire de l’inscription dans la Constitution de l’IVG. Au moment des émeutes de juillet 2023, il évoquait la régression ethnique de certains jeunes Français issus des quartiers.
Comment les centristes du MoDem ne se raidiraient pas devant cette caricature d’une France disparue.
Manif pour tous
D’autant qu’elle s’est accompagnée pendant quelques heures d’une possible nomination de Laurence Garnier à la tête d’un ministère de la famille. Soutien de La Manif pour tous, Laurence Garnier, sénatrice Les Républicains (LR) de Loire-Atlantique, s’est opposée à la constitutionnalisation de l’IVG en 2024. Et, pour faire bonne mesure, elle s’est prononcée contre l’interdiction des thérapies de conversion en 2021.
Retour vers le passé
C’est peu dire qu’on est loin du nouveau monde dont se réclamait Emmanuel Macron en 2017. Le président a fini par dire non à Garnier, mais garde Retailleau. Un aveu de faiblesse. Le bloc central est désormais un vrai bloc de droite. Et la dérive vers l’extrême droite ne fait que commencer. Il y a quelques jours encore, l’Élysée prétendait installer un parfum de cohabitation. Ça sent tout juste la naphtaline.
Combien de temps cet attelage anachronique va-t-il survivre ? Il serait étonnant qu’il ne se fracassât pas sur le budget. Ou sur les revendications sociales, toujours présentes. Mais peut-être ne verra-t-il pas le jour. À l’heure où ces lignes sont écrites, le bras de fer entre le président et son Premier ministre continue.
Serge Faubert
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