Michel Barnier présente sans conteste le profil idéal pour mener à bien l’opération politique qui se déroule sous nos yeux : l’union des droites.
Ultralibéral, il partage l’ADN économique de la Macronie. Partisan du tout sécuritaire, le Premier ministre est très proche des propositions du Rassemblement national en ce domaine. Enfin, adhérent des Républicains, il peut reprendre à son compte le pacte législatif de Laurent Wauquiez.
L’homme charnière
Plutôt qu’un homme de consensus comme le titrait imprudemment le Monde, Michel Barnier est un homme charnière. Une passerelle entre des familles politiques dont les contours sont devenus poreux au fil des ans. Et dont la réunion apparaît, somme toute, logique.
Cette coalition n’a pas de nom. Mais elle a une réalité arithmétique. Additionnés, le bloc central, la droite républicaine et le Rassemblement national dépassent largement le seuil de la majorité absolue. Une puissance de feu qui permet de faire adopter n’importe quel projet de loi, y compris les plus liberticides ou régressifs sur le plan social.
Marine Le Pen maîtresse du jeu
Mais cette coalition a un point faible. Sans les voix du RN, elle s’effondre. La vraie mission de Michel Barnier est donc d’écarter tout ce qui pourrait braquer la véritable maîtresse du jeu, Marine Le Pen. Pour le dire autrement, le nouveau Premier ministre est en liberté conditionnelle.
Pour le Rassemblement national, c’est sans doute la position la plus confortable. Gouverner sans endosser la responsabilité des décisions qui seront prises. Ça ne marche pas ? C’est la faute de Barnier. C’est une réussite ? C’est grâce à notre influence sur le gouvernement. Voilà le refrain qui ne va pas tarder à s’installer.
La bataille du budget
Pour autant, il n’est pas certain que l’attelage aille très loin. Sur le budget, le nouveau gouvernement devra composer avec la demande sociale, les exigences du CAC 40 et les ultimatums de Bruxelles. Le bras de fer commence le 1er octobre.
La ligne rouge de la réforme des retraites
Quant à l’abrogation des retraites que le RN entend proposer au vote de l’Assemblée le 31 octobre, lors de sa niche parlementaire, elle risque d’être fatale aux bonnes relations entre la droite et l’extrême droite. Emmanuel Macron ne permettra pas que la réforme soit remise en cause. D’autant que c’est, pour l’instant, le seul marqueur de son second quinquennat.
Le RN, lui, ne peut prendre le risque de revenir sur cette promesse. Michel Barnier trouvera-t-il le trou de souris qui permettra d’éviter la censure ? Il ne faut jamais jurer de rien, mais le défi semble démesuré. Surtout avec la gauche qui sera plus que jamais en embuscade.
La crise politique et institutionnelle n’est donc pas terminée. Tous les scénarios restent envisageables. Y compris celui d’un président de la République contraint de se tourner vers la gauche après l’échec de son Premier ministre…
Post scriptum
Merci à tous ceux qui m’ont adressé un message après mon édito sur ma participation aux débats des chaînes info. Vous avez été nombreux à m’encourager à continuer. Je n’ai malheureusement pu répondre à tout le monde. Mais sachez que j’ai été très sensible à vos commentaires.
Serge Faubert