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Ukraine, Gaza : la gauche se fait la guerre

Comment reconstruire l’unité à gauche ? Comment ressusciter un espoir ? Ce week-end, Jean-Luc Mélenchon, le leader de la France insoumise et Raphaël Glucksmann, la tête de liste socialiste, se sont donnés la réplique sur cet épineux sujet. Pour Jean-Luc Mélenchon, l’avenir de la gauche dépend du score de LFI. Selon le sondage réalisé par l’IPSOS pour le Cevipof, La Fondation Jean Jaurès, l’Institut Montaigne et le Monde la liste des insoumis serait à 7 %. Celle des socialistes est donnée à 11,5 %.

Si nous n’avons pas un bon score, tout le monde va dire : “Ah, vous voyez, il faut en revenir au centre-gauche, câliner la tête de tout le monde et arrêter avec les insoumis”. Si on a un très bon résultat, si nous sommes nettement devant, nous on viendra, on leur dira : “Mes chéris c’est comme la dernière fois, il faut faire l’union”.

Jean-Luc Mélenchon le 17/03/2024

S’en étonnera-t-on, Raphaël Glucksmann soutient exactement le contraire.

Je suis pour que la gauche se rassemble. Mais elle ne se rassemblera pas sur la ligne de Jean-Luc Mélenchon. Je vous le dis.

Raphaël Glucksmann le 17/03/2024

Ce sont surtout les questions internationales qui opposent Jean-Luc Mélenchon et Raphaël Glucksmann.

La paix est possible à propos de l’Ukraine à la condition qu’on comprenne une chose : au point où en est réduite la situation, il ne peut y avoir d’autre issue que celle où il n’y a ni vainqueur ni vaincu. Une paix qui donne à chacune des deux parties des garanties mutuelles.

Jean-Luc Mélenchon le 17/03/2024

Pour la tête de liste socialiste, il ne saurait être question d’arrêter la guerre à tout prix.

Si vous voulez la paix, si vous êtes réellement attaché à la paix, alors vous devez faire preuve de fermeté et ne pas récompenser l’agresseur.

Raphaël Glucksmann le 17/03/2024

Incarner le rassemblement

Le clivage ne s’arrête pas au théâtre ukrainien. À propos de Gaza, ce sont les mots qui divisent. Raphaël Glucksmann refuse de parler de génocide à Gaza. Il préfère évoquer un carnage. Ce qui fait bondir le leader insoumis.

En temps ordinaires, ces divergences, réelles, ne seraient pas insurmontables. Car la situation internationale, pour inquiétante qu’elle soit, ne structure pas le quotidien des Français. Il en ira peut-être autrement, demain, si des troupes françaises étaient engagées dans des combats avec les Russes. Mais pour l’heure, ces batailles ne se déroulent que dans la tête de notre bon président, un jour sur deux. Les Français sont davantage préoccupés par le pouvoir d’achat, la protection sociale ou la sécurité que par la géopolitique.

Jean-Luc Mélenchon pense être celui qui pourra rassembler toute la gauche, le moment venu. Mais pour incarner le rassemblement, encore faut-il que la liste insoumise arrive en tête des listes de gauche au soir du 9 juin. Et ce n’est pas gagné. Si l’on considère que l’élection européenne est le premier tour de la présidentielle de 2027, la liste de Manon Aubry doit, a minima, atteindre la barre des 22 %. Ce qui suppose qu’en trois mois, LFI multiplie par 3 les intentions de vote en sa faveur. Où trouver les voix qui manquent ? Du côté des électeurs qui, en 2022, ont glissé dans l’urne un bulletin Mélenchon ? Mais ce n’est pas si simple. Un récent sondage de l’institut Cluster17 indique que seulement 42 % des électeurs mélenchonistes de 2022 sont prêts à voter pour la liste LFI. Une proportion que l’Institut Elabe ramène, pour sa part, à 33 %.

La question de l’abstention est centrale

Si Jean-Luc Mélenchon a réalisé le score que l’on sait, c’est parce que des électeurs écologistes, communistes ou socialistes ont choisi de voter utile dès le premier tour. En d’autres termes, ils se sont dit : “Mélenchon a plus de chances de passer que Jadot, Roussel ou Hidalgo”. Constat qui relevait de l’évidence, au moins pour les deux derniers. Vote-t-on pour une ambulance ou un corbillard ? Ces transfuges d’un jour n’ont pas l’intention de revenir dans le giron insoumis. Car l’élection européenne est l’occasion pour une majorité d’électeurs de manifester une préférence partisane sans risque majeur.

Pour le dire autrement, le 9 juin est perçu comme un moyen de rééquilibrer les rapports de force à l’intérieur des différentes familles politiques. Un sondage grandeur nature en quelque sorte. Reste alors les quelque 12 millions et demi d’abstentionnistes de la présidentielle. Mais s’ils revenaient voter, qui peut dire que leur voix se porterait sur Manon Aubry plutôt que Jordan Bardella ou Valérie Hayer, la tête de liste Renaissance.

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