Les socialistes avaient fait de la taxe Zucman un marqueur. Celui de leur acceptation du compromis avec Sébastien Lecornu et les macronistes. C’était, avec la suspension de la réforme des retraites, la seconde condition pour que s’ouvre la construction d’un budget acceptable par le bloc central et la gauche réformiste.
Mais voilà, pour ménager les Républicains et surtout son propre camp, le Premier ministre a abattu la carte de l’inconstitutionnalité du prélèvement envisagé. Aimable alibi pour écarter toute remise à niveau de la fiscalité des ultra-riches.
Censurer, c’est perdre les gains encaissés
Du coup, le Parti socialiste se retrouve plongé dans un gouffre de perplexité. S’il censure le gouvernement, fidèle en cela à ses déclarations passées, c’est le budget qui s’effondre. Et avec lui, les concessions réelles obtenues jusqu’à présent : la suspension de la réforme des retraites et le dégel de l’indexation des pensions des retraités. Sans oublier la taxation des bénéfices des multinationales proportionnellement à leur activité réalisée en France, la taxation des rachats d’action ou le doublement de la taxe sur les GAFAM.
Autant de briques qui viennent valider le choix de du Parti socialiste de jouer le jeu parlementaire. C’est ce qu’ont rappelé hier Olivier Faure et Boris Vallaud après le rejet par l’Assemblée de la taxe Zucman.
Rester, c’est capituler
Mais ces gains passent inaperçus aux yeux de la majorité des Français. Au mieux, ils sont considérés comme des miettes. C’est une question de cohérence. On ne peut pas fixer un ultimatum et faire comme si de rien n’était une fois que l’adversaire a refusé de s’y plier.
Pire, l’opinion ne voit dans le récit du Parti socialiste qu’une tentative maladroite de justifier de nouveaux reculs. C’est bien le drame de ce parti. Il porte un héritage dont le temps n’a pas encore effacé le souvenir. Celui du hollandisme et de ses capitulations successives.
Trouver la porte de sortie
Au sein même du groupe socialiste, plusieurs députés estiment qu’il est temps d’arrêter une aventure qui ne mène nulle part. En l’état, le budget sera rejeté par une majorité de députés.
Les gains qui pourraient être encore engrangés sont illusoires. Il faut sortir par la grande porte.
Bref, s’il a incontestablement marqué des points dans la bataille pour le leadership de la gauche, le PS est pris à son propre piège. S’il continue la partie, il sera accusé de reculer une nouvelle fois ; s’il renverse la table, il donnera raison, entre autres, à LFI. De deux maux, il va falloir choisir le moindre.
Serge Faubert