
S’agit-il d’empêcher l’Iran d’avoir la bombe atomique et de l’utiliser ou bien de renverser le régime des mollahs ? Depuis 48 heures, la question est posée. Depuis ce post de Donald Trump sur son réseau social : “Il n’est pas politiquement correct d’utiliser le terme “changement de régime”, mais si le régime iranien actuel n’est pas en mesure de RENDRE SA GRANDEUR A L’IRAN, alors pourquoi n’y aurait-il pas un changement de régime ? Make Iran Great Again !!!”
Spectaculaire revirement d’un président élu sur une promesse isolationniste. Que n’a-t-il pas dit sur les aventures menées par ses prédécesseurs, que ce soit en Irak, en Lybie, en Syrie ou en Afghanistan. Et voilà qu’à son tour Donald Trump entreprend de remodeler le monde au gré de ses intérêts. L’imminence d’une frappe nucléaire iranienne relève-t-elle de l’enfumage ? Un enfumage analogue à celui qui avait précédé l’intervention américaine en Irak en 2003 ? Quand le secrétaire d’État américain, Colin Powell, affirmait que Saddam Hussein détenait des armes de destruction massive. Le général avait même été jusqu’à brandir une fiole censée contenir de l’anthrax lors d’une réunion du Conseil de sécurité.
En d’autres termes, l’Iran était-il en mesure d’assembler et lancer une bombe nucléaire sur Israël dans un délai de 15 jours comme le soutient Benyamin Netanyahou ? Il y a trois jours, Jean-Luc Mélenchon rappelait que les services de renseignement américains étaient parvenus à la conclusion inverse.
Vous savez que les États-Unis ont 19 agences de sécurité, une fois de temps à autre, c’est-à-dire une fois, ils se mettent d’accord pour écrire un rapport. Dans le dernier qui est paru, je crois que c’était dans le semestre qui vient d’avoir lieu, ils disent : “Non, le risque de l’arme nucléaire n’y est pas, à la fois parce que les Iraniens ne disposent pas des quantités d’uranium concentré dont ils ont besoin et deuxièmement ils n’ont pas le vecteur”.
Jean-Luc Mélenchon, chef de file de La France insoumise, le 20/06/2025
Le renseignement américain contredit Donald Trump
En mars de cette année, la directrice nationale du renseignement américain, Tulsi Gabbard, affirmait en effet devant le Congrès que l’Iran n’était pas en train de fabriquer une arme nucléaire. Les journalistes américains n’ont pas manqué de rappeler à Donald Trump les déclarations de la patronne des espions. Ce qui n’a pas ébranlé le président.
Il y a deux jours, Tulsi Gabbard, trumpiste convaincue, a mis de l’eau dans son vin. Beaucoup d’eau. Elle affirme maintenant que l’Iran pouvait disposer de la bombe d’ici à quelques mois. Un pieux mensonge qui lui aura permis de sauver son poste. Car les services américains ne sont pas les seuls à avoir conclu à l’absence d’un danger imminent. Le 17 juin, Rafael Grossi, le directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique, l’organisme international qui surveille les installations iraniennes, tenait à peu près le même discours.
Qui croire ? Si l’on se tourne vers notre ministre de la défense, Sébastien Lecornu, l’imminence du danger est bien réelle. Il l’affirme dans le Parisien de samedi.
Nos services de renseignement français produisent des analyses qui nous permettent de certifier que l’Iran dispose bien des différentes pièces pour une bombe nucléaire.
Sébastien Lecornu, ministre de la Défense et des Armées, le 21/06/2025
Et comme dirait OSS 117, nos agents sont les meilleurs du monde. Quoi qu’il en soit, la solution ne peut être militaire, a rétorqué Emmanuel Macron après la frappe américaine sur l’Iran.
Nous appelons tous et toutes à ce qu’il n’y est pas d’escalade, convaincus qu’aucune réponse strictement militaire ne peut produire des effets recherchés et que la reprise de discussions diplomatiques et techniques est le seul moyen d’obtenir l’objectif que nous recherchons tous qui est que l’Iran ne puisse pas se doter de l’arme nucléaire.
Emmanuel Macron, président de la République française, le 22/06/2025
Un débat à l’Assemblée nationale
Dans la foulée, l’Élysée a confirmé qu’un débat serait bien organisé à l’Assemblée nationale, ce mercredi, sur le conflit israélo-iranien. A 21 heures 30. Comme pour être bien sûr qu’il n’y ait pas trop de monde dans l’hémicycle ou devant la télévision. A vrai dire, le débat a déjà commencé. Mardi dernier, les premières escarmouches ont opposé la France insoumise au gouvernement.
Le droit international est clair : l’Iran est l’agressé et Israël l’agresseur, comme le rappelle l’ancien ambassadeur de France en Israël et aux États-Unis. Monsieur Barrot c’est la première fois que la diplomatie française confond guerre préventive et droit à se défendre. A ce stade, il est urgent que vous changiez de métier.
Alma Dufour, députée La France insoumise, le 17/06/2025
Réponse de Jean-Noël Barrot, ministre des affaires étrangères.
Maintenant, madame la députée, vous vous faites l’avocate du régime iranien. Faut-il rappeler, madame la députée, que le régime iranien dispose de capacités nucléaires et balistiques susceptibles de toucher le territoire européen ? Faut-il rappeler que le régime iranien a soutenu tous les groupes terroristes, qu’il s’est félicité de l’attentat du 7 octobre suite auquel 50 de nos compatriotes ont perdu la vie ?
Faut-il rappeler que le régime iranien a livré des centaines de missiles et des milliers de drones à la Russie qui encore hier soir a agressé l’Ukraine avec une violence et une cruauté sans limite ? Faut-il rappeler, faut-il rappeler, que le régime iranien retient otage nos deux compatriotes Cécile Kohler, Jacques Paris.
Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, le 17/06/2025
Reste-t-il un chemin pour la diplomatie ? Soufflant le chaud et le froid, Trump se déclare toujours intéressé par une solution diplomatique. Encore faut-il un tiers de confiance pour la porter. Car on voit mal le régime iranien négocier avec ceux qui bombardent le pays. La France a certainement une carte à jouer. Mais il serait bien étonnant que la Maison Blanche lui laisse un espace. Trump ne respecte que la force. Quant aux Israéliens, ils espèrent en finir une fois pour toutes avec les mollahs.