Dans les albums de Lucky Luke, il y a un personnage récurrent. Le croque-mort. Il apparaît au détour d’une case chaque fois que les pistolets vont parler. Avec Michel Barnier, c’est un peu la même chose. Sauf que les croque-morts sont plus nombreux. Certes, le Savoyard n’a rien d’un pauvre cavalier solitaire loin de chez lui, même si la Savoie, ce n’est pas la porte à côté. Pourtant ce week-end, ils étaient nombreux dans la classe politique à questionner à haute voix les chances de survie de son gouvernement. Alors même que celui-ci n’est pas constitué.
Cette perspective qui voudrait qu’au profit d’une élection très compliquée à déchiffrer, devant un paysage de l’Assemblée nationale extrêmement morcelé, ce soit un parti minoritaire qui impose ses vues, c’est impossible. Ça ne marcherait pas. On aurait un accident majeur. Ce gouvernement n’aurait aucune espérance de vie.
François Bayrou, maire de Pau et président du MoDem, le 15/09/2024
Le soutien du MoDem en question
En clair, si Michel Barnier abandonne les manettes à Laurent Wauquiez et ses amis, il ne faudra pas qu’il compte sur le soutien du MoDem. “Pas de virage à droite” dit Bayrou. « Pas question de continuer la politique actuelle » répond Jordan Bardella.
Rien ne peut désormais se faire sans le Rassemblement national ou contre le Rassemblement national. Le Premier ministre Michel Barnier est sous notre surveillance démocratique, comme il est sous la surveillance démocratique de tous les électeurs français.
S’il n’est que le prête-nom du macronisme, s’il n’est que le continuateur zélé d’une politique rejetée par une grande majorité du pays, s’il reste le collaborateur du président de la République, alors ce gouvernement tombera.
Jordan Bardella, député européen RN et président du RN, le 14/09/2024
Existe-t-il un trou de souris entre la droite et le macronisme ? Si tel est le cas, le rongeur qui l’habite doit être microscopique. De toute façon, Marine Le Pen ne croit pas que Michel Barnier puisse rester à son poste très longtemps.
Ça ne peut pas durer. Notre grand pays qu’est la France ne peut pas fonctionner ainsi, ne peut pas avoir un gouvernement dirigé effectivement par une force politique qui a fait 5 % et qui, précisément, a été choisie parce qu’ils ont fait 5 %. Vous voyez bien, à l’évidence, ça ne peut pas tenir. Et que les alliances qui pourraient s’effectuer demain entre les différents groupes seraient évidemment des magouilles.
Marine Le Pen, députée RN et présidente du groupe RN à l’Assemblée nationale, le 14/09/2024
Le parti de l’ordre
Mais qu’on se le dise, Marine Le Pen n’alimentera pas le chaos. Elle entend que le Rassemblement national soit désormais l’incarnation du parti de l’ordre. C’est ce qu’elle a déclaré, samedi, lors des journées parlementaires de son parti. Journées auxquelles Pure Politique n’a pu assister bien qu’ayant déposé sa demande d’accréditation dans les délais.
Officiellement, ce sont des raisons de place qui ont conduit le RN à refuser cette accréditation. On me permettra de rester dubitatif… Quoi qu’il en soit, cela ne nous empêchera jamais de commenter l’actualité du RN.
Nous devons dans les semaines et les mois qui viennent, faire en sorte que le Rassemblement national, les élus du Rassemblement national, fassent ruisseler sa crédibilité sur l’ordre au reste de notre programme. Parce qu’après tout, Jordan l’a dit, tout n’est que désordre aujourd’hui.
Marine Le Pen, députée RN et présidente du groupe RN à l’Assemblée nationale, le 14/09/2024
C’est donc une clarification qui se prépare. Car avec l’ordre pour seul programme, le RN revient aux fondamentaux de l’extrême droite. Plus de faux-semblants sur le social ou la République. On soulignera simplement que la comparution prochaine de Marine Le Pen devant un tribunal dans l’affaire des assistants parlementaires rémunérés par l’Europe alors qu’ils travaillaient pour le RN risque de faire sacrément désordre pour un parti qui donne des leçons de probité à toute la classe politique.
Revenons à Michel Barnier. On s’en doute, le Premier ministre n’a aucune n’a aucune mansuétude à attendre de la part de Jean-Luc Mélenchon.
Voici monsieur Barnier. Mais monsieur Barnier, ce n’est pas un passant dans la rue, c’est un malin. Il est le chef, maintenant, de fait, du parti qui a perdu mais c’est lui qui est Premier ministre, et il va remplir le gouvernement de perdants. Et monsieur Macron n’est plus en état de lui dire “non”. C’est lui qui choisit le gouvernement. Vous allez voir.
Votre pays a voté d’une manière et vous avez un gouvernement qui est exactement à l’inverse, c’est-à-dire exactement ce que vous n’avez pas voulu. Eh bien, ça, c’est une crise politique.
Jean-Luc Mélenchon, chef de file de La France insoumise, le 14/09/2024
Une crise politique dont le dénouement passe par le départ du chef de l’État. Justement, demain, mardi, le bureau de l’Assemblée – où le Nouveau Front Populaire est majoritaire -, examinera recevabilité de la procédure de destitution lancée par la France insoumise. Les Écologistes et les communistes ont exprimé leur intention de soutenir la motion des insoumis. Le PS réfléchit encore à sa position.